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La vie après la mort
Il y a plus de trente ans, dans le cimetière protestant de Nîmes, à la fin d'un culte d'ensevelissement où j'avais lu des passages du Nouveau Testament qui parlent de la vie éternelle et de la résurrection des morts, une femme m'a dit à mi-voix : "que ces versets sont beaux, je voudrais y croire, mais je n'y arrive pas; j'aimerais tellement que cette espérance me soit donnée". Cette émouvante confidence exprimait ce que ressentent beaucoup de chrétiens : croire en une vie après la mort paraît bien difficile. Cette difficulté tient, me semble-t-il, à deux raisons.
Mort et anéantissement
Pendant longtemps, on a nettement distingué dans l'être humain deux éléments : le corps et l'âme. La mort physique, estimait-on, n'entraîne pas automatiquement la mort spirituelle; l'âme pouvait continuer à exister indépendamment du corps qui lui avait été associé un certain temps.
Aujourd'hui, on insiste sur l'unité de l'être humain; on voit dans la vie biologique le support et la condition de la vie consciente, émotive, intellectuelle ou spirituelle. Elles ont besoin l'une de l'autre, et la mort de l'une entraîne celle de l'autre. Le décès physique, pense-t-on, anéantit l'être tout entier
À cette difficulté, on apporte deux réponses différentes.
1. La première conteste l'indissolubilité du corps biologique et de la personne. Beaucoup de gens croient en la réincarnation; pour eux, la même personne vit avec des corps différents successifs. D'autres parlent d'O.B.E. (des expériences de "sortie du corps") et de communications avec les morts. Une abondante littérature traite de ces thèmes. Les uns la considèrent avec mépris; d'autres s'interrogent sur sa validité dans un débat parfois vif.
2. La deuxième réponse souligne que l'affirmation évangélique de la vie éternelle ne tient pas à la composition de notre être ou à des expériences étranges. Elle se fonde sur une promesse, et relève de notre confiance (autrement dit de notre "foi") en Dieu. Le débat que je viens d'indiquer n'a rien de déterminant. Je suis appelé non pas à chercher des indices ou des preuves, mais à croire dans la promesse divine. En douter n'a rien d'anormal, mais n'empêche pas la Parole de susciter en nous l'espérance que même si la mort nous anéantit, Dieu a la volonté et la puissance de nous ressusciter.
Se représenter l'au-delà
Une deuxième raison rend difficile de croire en la vie après la mort : nous n'arrivons pas à nous l'imaginer. Pendant longtemps, des poèmes (pensons à la Divine Comédie de Dante), des tableaux, des dessins dans les catéchismes ont décrit ou dépeint le paradis (un jardin enchanteur) et l'enfer (un sinistre lieu de tourments). On les situait soit au dessus de la terre, au Ciel soit au-dessous, dans des abîmes. Tout cela nous semble aujourd'hui enfantin et incroyable.
En fait, toutes ces représentations transfigurent en bien ou en mal l'ici-bas; elles attribuent au paradis ce qu'il y a de mieux, et à l'enfer ce qu'il y a de pire dans notre monde. L'au-delà, nous ne pouvons pas nous le figurer, précisément parce qu'il s'agit d'un au-delà qui diffère totalement de ce que nous connaissons. Calvin disait que nous n'avons pas un savoir sur la vie éternelle, mais seulement un "petit goût"; la foi nous en donne la saveur et non la connaissance.
À la différence l'apocalyptique juive ou du paganisme de l'époque, le Nouveau Testament, quand il parle de la vie éternelle, ne la décrit pas. Il l'évoque à travers des paraboles ou des métaphores. Il fournit des symboles, pas une doctrine. Nous ignorons ce que nous serons et comment nous serons après la mort. Tout ce que nous pouvons dire, c'est, selon la formule de Paul, qu'elle ne nous séparera pas de l'amour que Dieu nous a manifesté en Jésus-Christ. Nous serons "avec Christ", sans pouvoir préciser comment se concrétisera cet "avec". Nous ne pouvons rien dire de plus, mais c'est déjà immense, et cela suffit pour illuminer notre existence présente.
André Gounelle
Le Cep, avril 2001
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