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La corrélation : ontologie et méthodologie

 

La méthode

Tillich souligne à plusieurs reprises que la réflexion méthodologique ne fournit pas un outil neutre (« un filet indifférent », écrit-il) qu’on pourrait utiliser dans tous les domaines et pour n’importe quel objet. Une méthode qui fonctionne bien en physique ou en mathématiques ne convient pas du tout pour l’histoire ou pour la philosophie ; quand l’empirisme prétend avoir une validité universelle, il fait un acte d’ « impérialisme méthodologique » qui entrave la perception et appauvrit la compréhension de la réalité. Une méthode juste ne se construit ni ne s’impose a priori ; elle découle d’une pratique et sa définition se déduit, par abstraction, des démarches déjà faites, permettant ainsi de les vérifier et d’aller plus loin. Elle ne précède pas la connaissance, elle la suit ou, plus exactement, l’accompagne. Elle n’engendre pas une conception de l’être (autrement dit une ontologie) ; elle en fait partie, lui appartient et on ne peut pas l’en dissocier[1] . La rencontre avec la réalité (source de tout savoir) met en jeu trois facteurs : la nature et la structure de ce qui est rencontré ; la nature et la structure de celui qui rencontre ; la nature et la structure de la rencontre, autrement dit de la relation qui s’établit. La méthodologie décrit, analyse et évalue ces trois facteurs [2]. Elle n’invente ni ne forge la méthode, mais peut éventuellement en disqualifier une en montrant son inadéquation.

Avant de désigner et de définir une méthode, la corrélation renvoie à un principe ou à une structure ontologique. Un relevé sémantique montrerait que si les mots « corréler » et « corrélation » (on trouve aussi « interrelation ») apparaissent très tôt sous la plume de Tillich, l’expression « méthode de corrélation » n’est courante que dans les années 1947-1957, au moment où la rédaction de la Systematic Theology le conduit à traiter plus amplement des questions méthodologiques. Elle se fait ensuite moins fréquente, même s’il est toujours souvent question de corréler. Je ne l’ai pas repérée avant 1947 ; elle est absente de l’article de 1941, Philosophie et Théologie [3] dont pourtant Tillich écrit « qu’il explique et applique cette méthode » [4]. On ne la trouve guère après 1957 ; elle n’apparaît pas dans The Courage to Be (1957) dont on considère généralement qu’il en est une brillante application ; j’ai relevé seulement de rares occurrences dans le tome 3 (1963) de la Théologie systématique. Les textes qui en traitent directement et explicitement, s’ils ont été abondamment commentés et ont fait couler beaucoup d’encre, sont relativement peu nombreux et assez brefs.

Durant la période allemande (ainsi dans la Dogmatique de 1925), il est surtout (mais pas uniquement) question de la « révélation corrélationnelle » ou de la « corrélation de la révélation ». Ces expressions, qui reviennent aussi assez souvent dans des textes plus tardifs, entendent souligner qu’il n’y a, à proprement parler, révélation que si quelque chose se révèle et que s’il se révèle à quelqu’un. Elle implique tout autant un objet dévoilé qu’un sujet percevant ou recevant ; si l’un des deux manque, elle ne se produit pas ; s’ils se séparent, elle se désagrège ou se désintègre [5]. Elle n’est ni un dévoilement objectif qui, à la rigueur, ne pourrait atteindre personne (tel un document disponible dans des archives qu’il est possible de consulter mais ne l’est jamais), ni une expérience purement subjective sans référent externe (ce qui en ferait un rêve, une illusion ou une chimère). Indissociablement réalité « en soi » et vérité « pour nous », elle se définit, comme d’ailleurs tout événement, par cette bipolarité qui la constitue et lui est essentielle. Je rends polarity, qu’utilise Tillich, par « bipolarité » pour qu’il soit clair que les polarités dont il parle sont constituées par deux pôles et non par un seul, comme « polaire » ou « polarité » pourrait, en français, le laisser penser. Le lien ou la rencontre entre les deux pôles ne va pas de soi, et il faut s’interroger sur ce qui en profondeur donne à un objet une dimension existentielle, sur ce qui permet à une parole de porter un message pour quelqu’un, sur ce qui rend possible qu’un « en soi » soit en même temps un « pour autrui ». Il s’agit bien, on le voit, d’analyses phénoménologiques (qui portent sur l’être tel qu’il se manifeste à nous) et ontologiques (qui s’intéressent à l’être tel qu’il est en lui-même) et non méthodologiques, même si, inévitablement, ces analyses vont très vite déboucher sur le problème de la démarche à suivre quand on annonce et qu’on explique le message chrétien. En effet, le théologien (au sens de celui qui parle de sa foi en Dieu dans un discours sensé) va et doit se demander comment procéder pour éviter la dissociation des deux pôles et pour surmonter une coupure qui les aliènerait l’un et l’autre, autrement dit pour maintenir le caractère révélé de la source dont il se réclame. La méthode n’a de validité et de fécondité, elle ne s’impose que parce qu’elle correspond à des structures phénoménologiques et ontologiques fondamentales.

Le réalisme auto-transcendant

Tillich caractérise par l’expression de « réalisme auto-transcendant » ou « réalisme extatique »[6] l’ontologie qui commande la méthode de corrélation. Il l’oppose à deux autres schémas ontologiques : celui du naturalisme et celui du supranaturalisme[7]. Nous en donnons une présentation typologique, non pas en décrivant des positions concrètes, mais en dégageant les structures logiques qui les sous-tendent et qui n’existent nulle part à l’état pur ; dans les faits, elles se mitigent, se nuancent, s’atténuent, se complexifient.

Tillich appelle « naturalisme » une ontologie sans transcendance. Elle voit dans la réalité une totalité qui se suffit à elle-même, qui ne renvoie à rien d’autre qu’elle, qui n’a besoin ni d’origine ni de finalité externes, qui n’admet « aucun dépassement de soi, aucune consécration de l’existence »[8]. Il n’y a pas à chercher un sens ou une vérité en dehors, à côté, au dessous ou au dessus du posé ou du donné. Aucune distance ni différence n’empêchent l’assimilation pure et simple de Dieu avec la réalité, d’où la célèbre formule de Spinoza Deus sive natura, « Dieu, autrement dit, la nature », même si la distinction entre natura naturans et natura naturata fait de la pensée de Spinoza autre chose qu’un simple naturalisme et l’apparente à un réalisme auto-transcendant. La nature (ou l’univers) et le divin sont identiques, ce qui rend sémantiquement superflu le mot « Dieu » [9]. Une transformation et le surgissement d’un novum sont exclus. L’être a une seule dimension et le monde est autonome. On a une pensée monopolaire, où une corrélation n’a aucune place possible faute d’éléments différents à corréler.

Le supranaturalisme propose une hétéro-transcendance, une transcendance qui se situe ailleurs que dans la réalité mondaine et qui en diffère radicalement (elle est totaliter aliter). Il « voit en Dieu un être, l’être suprême et l’isole de tous les autres êtres » [10]. En d’autres termes, il conçoit un sur-naturel, extérieur et supérieur à la nature, ontologiquement séparé du réel donné et déconnecté de l’homme qui fait partie du monde ou, en tout cas, qui y vit. Le banal, en lui-même, est insignifiant ; il est pauvre, déficient, insuffisant ; il est, mais n’a pas en lui son sens et sa vérité ; il faut les chercher ailleurs et on ne les trouve qu’en renonçant au monde et en mourant à soi-même. La nature se trouve à distance et en face d’un divin qui lui est hétérogène. L’ultime ne se situe pas dans la même région de l’être. Dieu est foncièrement étranger au monde ; ce thème, qu’on rencontre ou qui affleure parfois chez Barth [11], prend une forme extrême avec Marcion, qui, selon le sous-titre du livre que lui consacre Harnack[12], annonce l’évangile du Dieu étranger : le Dieu de Jésus, qui n’a rien à voir avec le monde (il n’en est pas le créateur), vient du dehors et le secourt en le transformant, en le rendant différent de ce qu’il est naturellement (c’est à dire par sa naissance ou son origine). « L’homme doit devenir quelque chose d’autre qu’humain pour recevoir la divinité » [13]. Le supranaturalisme, à la différence du naturalisme, est bien binaire ; mais entre les deux réalités qu’il distingue, aucune bipolarité n’est possible ; elles sont trop extrinsèques et hétérogènes l’une à l’autre pour que s’établisse une connexion positive. Quand elles se rencontrent, elles entrent en conflit et chacune cherche à anéantir l’autre. La logique supranaturaliste conduit à la fois à la mort de Dieu et à la fin du monde. D’une part, elle se forge un Dieu qui est un « objet » fini (l’infinité qu’il lui prête n’est qu’une finitude élargie ou étendue), puisque limité et contrarié par le monde ; elle n’en reconnaît pas vraiment la divinité. D’autre part, elle perçoit l’homme comme soumis à une hétéronomie, à une loi qui contraint sa liberté et brise son humanité ; elle prive le monde de toute autonomie et donc d’une réalité propre. Cette ontologie se montre tout aussi incapable que la naturaliste de penser et de mettre en place une véritable corrélation, faute d’un lien ou d’un terrain commun qui permettrait de dépasser les antagonismes engendrés par la distinction radicale qu’elle a introduite.

Tillich ne prétend pas que le réalisme auto-transcendant, qui permet d’échapper au « débat vicié entre naturalisme et supra-naturalisme » [14], soit une découverte ou une nouveauté. Au contraire, il indique qu’on le rencontre, en tout cas partiellement et implicitement, chez des théologiens aussi connus qu’Augustin, Thomas d’Aquin, Luther, Zwingli et Calvin [15] (de même la méthode de corrélation qui en fait partie est « aussi ancienne que la théologie » [16]). Le principe en est que la transcendance se rencontre au sein du réel sans toutefois se confondre avec lui ; elle le dépasse infiniment tout en lui étant interne [17]. Elle ne lui est ni extérieure, ce qui différencie cette ontologie du supranaturalisme, ni identique, ce qui la sépare du naturalisme.

La transcendance n’est pas ici pas un « “super-monde” d’objets divins », elle est la présence d’une altérité qui structure le monde et l’homme, qui fait d’eux ce qu’ils sont. Pour en parler, Tillich utilise la métaphore de la « dimension de la profondeur » [18]. En moi, il y a plus que moi ; dans le monde, il y a plus que le monde. Ce « plus » n’est pas un élément adventice ou externe ; il est, selon une formule d’Augustin, reprise par Luther, plus proche de moi que je ne le suis de moi-même [19], tout en m’étant infiniment supérieur. Pour nous, Dieu est en même temps et indissociablement l’autre (plus autre que quoi que ce soit) et l’intime (plus intime que quoi que ce soit). Entre lui et le monde il y a une « réciprocité » qui exprime leur interdépendance essentielle et une tension qui traduit leur irréductible « autonomie » [20]. Leur « mutuelle immanence » s’accompagne d’une « distinction constitutive » [21]. Rattachement et opposition, pour reprendre une expression de Bultmann [22], vont de pair. Dieu est en même temps « contre le monde et pour le monde » ; réciproquement le monde est à la fois contre Dieu et pour Dieu. On ne peut ni les séparer ni les fusionner ; ils s’appellent et s’interpellent mutuellement ; ils ont besoin l’un de l’autre et ont besoin de leur différence pour être ce qu’ils sont. L’homme est la condition de Dieu (selon le titre d’un livre de Vahanian[23]), ce qui ne veut pas dire que l’homme crée Dieu (affirmation qui serait absurde et blasphématoire), mais que Dieu n’est vraiment Dieu, et pas un être ou un objet métaphysique indéfinissable, que dans et par sa relation avec l’homme [24]. Il dépend de l’homme non pas « dans sa nature abyssale » - dont on ne peut rien dire - mais « dans son auto-manifestation à l’homme » [25]. À l’inverse, Dieu est la condition de l’homme, en ce sens que la quête de l’ultime constitue l’humain à un point tel que Tillich doute qu’un véritable athéisme lui soit possible[26]. Parce que Dieu et l’homme, bien que n’étant nullement identiques, se conditionnent mutuellement dans leur être même, « la relation divino-humaine est une corrélation »[27]. De manière analogue, à un autre niveau, il y a corrélation entre « le soi et le monde » : il n’y a de monde que pour et par un soi (ce qui ne veut pas dire que le soi crée le réel, mais que c’est dans son regard que le réel qu’il rencontre devient monde) et il n’y a de soi que parce qu’il y a un monde face auquel il se constitue [28]. Dieu et le monde, l’homme et le monde, ce n’est évidemment pas la même chose ; pourtant, ils n’existent en tant que Dieu, en tant que monde et en tant qu’homme que dans leur rencontre et leur confrontation.

Cette ontologie de la bipolarité, que développe le réalisme auto-transcendant, appelle et permet la méthode de corrélation. La corrélation implique, en effet, la correspondance de pôles distincts et interdépendants, qu’on ne peut ni unifier ni dissocier. En dehors de cette structure ontologique, la méthode n’est pas envisageable, ou n’est qu’une didactique artificielle, une « recette » ou un « mécanisme » [29], sans grande portée ni profondeur.

L’interdépendance des deux pôles

Tillich différencie, oppose et critique deux démarches théologiques ; il nomme la première « déductive » « supranaturaliste » ou « métaphysique », la seconde « inductive », « empirique », ou « naturaliste ou humaniste » [30].

La première démarche part « d’en haut » [31], autrement dit du message biblique et des dogmes censés définir son contenu, pour aller vers le « bas », autrement dit vers ce qui se passe et ce qu’on vit quotidiennement. La vérité « métaphysique » éclaire les réalités physiques ; l’éternel permet de comprendre le temporel ; le « révélé » explique le « naturel ». La deuxième, à l’inverse, part « d’en bas », de l’expérience et des faits, pour se diriger vers le haut. Les grandes affirmations dogmatiques du christianisme ne sont pas des énoncés théoriques ou spéculatifs ; elles traduisent ou expriment des réalités existentielles qui leur donnent un contenu concret, en dévoilent le sens et en montrent la pertinence ; ces réalités vivifient les vérités théologiques. Le physique conduit au métaphysique, le temporel achemine vers l’éternel, le naturel donne une assise au révélé. Ainsi en christologie, la première démarche utilise le thème des deux natures ou du Logos incarné pour rendre compte des gestes et des paroles de Jésus tels que les racontent les évangiles, tandis que la seconde se sert de ce que nous savons historiquement de Jésus de Nazareth (ou, plus radicalement, de la condition humaine en général) pour fonder et rendre compréhensibles les dogmes trinitaires et christologiques. La théologie inductive cherche dans l’histoire ou dans une anthropologie, parfois influencée par des analyses à tonalité marxiste ou psychanalytique, les portes qui ouvrent à la compréhension de Dieu ou du Christ, alors que selon la théologie déductive seule une révélation supranaturelle fournit les clefs nécessaires à l’intelligence de la condition humaine.

Dans ce contexte, il est tentant de voir dans la méthode de corrélation une tentative pour allier et combiner les démarches déductive et inductive. Elle mettrait en correspondance ou en résonnance la doctrine religieuse déduite de la révélation avec les expériences et les savoirs du monde sécularisé. Elle fonctionnerait comme un parvis où se croisent, se rencontrent, dialoguent et s’accordent le sacré et le profane. Les résultats obtenus par la démarche qui part du haut et par celle qui débute par le bas convergeraient et se rejoindraient. Les deux niveaux (en gros celui qu’étudie la théologie naturelle et celui de la révélation) s’articuleraient l’un à l’autre. Par exemple, le thème culturel de l’aliénation et le concept biblique de péché désigneraient à peu près la même chose dans deux registres, selon deux langages ou sous deux angles différents. Le théologien apologète aurait pour tâche de faire apparaître ces coïncidences et l’Église devrait les utiliser dans sa prédication et sa catéchèse afin que l’évangile ait et garde de l’impact.

Cette interprétation peut se défendre, en se fondant sur quelques passages de la Systematic Theology [32] et aussi sur plusieurs articles centrés sur la question de la relevance du message chrétien[33]. Elle ne rend cependant pas vraiment justice à la corrélation qu’elle réduit à une seule des significations signalées par Tillich [34] : la correspondance ou la coordination « entre différentes séries de données », en l’occurrence entre ce que nous pouvons apprendre de la révélation et ce que nous pouvons connaître par nos propres moyens. De fait, Tillich écarte cette démarche qu’il qualifie de « dualiste ». Certes, il la condamne moins sévèrement que celles du supranaturalisme et du naturalisme ; il lui reconnaît le mérite d’avoir plus conscience que les deux autres « du problème que la méthode de corrélation essaie d’affronter »; il considère qu’elle mélange vérité et erreur[35]. Il la rejette cependant ; « la combinaison des deux types […] ne peut pas aboutir » [36]. La corrélation ne se réduit pas à une simple concordance ; elle implique une « interdépendance », par quoi il faut entendre « l’unité de la dépendance et de l’indépendance de deux facteurs » [37] dont chacun n’existe qu’avec et par l’autre, sans toutefois que soit annulée leur dualité. Pannenberg me semble l’avoir bien perçu quand il écrit que Tillich échappe à l’alternative « d’en haut - d’en bas » parce que chez lui le « haut lui-même est conçu à partir de l’homme » [38]. Il n’y a pas d’un côté (en haut) Dieu et de l’autre côté (en bas) l’homme ; Dieu fait partie de l’homme et l’homme fait partie de Dieu ; toutefois, Dieu n’est pas l’homme et l’homme n’est pas Dieu. S’ils ne se confondent jamais, ils sont toujours imbriqués ou conjoints sans pourtant s’unifier. Ils ne sont jamais l’un sans l’autre, tout en étant irréductiblement l’un et l’autre. L’image d’une « ellipse à deux foyers » est celle qui rend le mieux compte de ce type de relation[39] : l’ellipse disparaît si un foyer élimine l’autre ou si les deux foyers fusionnent.

Les démarches déductive et inductive aboutissent (ou espèrent aboutir) à un point de jonction où le mouvement s’arrête et se fige, parce que, d’une certaine manière, la distance entre le haut et le bas s’abolit dans leur rencontre. Quand Tillich décrit la méthode de corrélation, il ne parle pas d’une descente ou d’une montée, mais d’un va et vient sans fin ou d’un aller-retour incessant entre question et réponse [40]. Il s’agit, dit-il, pour la théologie, de montrer que la réponse aux questions des hommes se situe en Dieu ; leurs problèmes trouvent leur solution dans la révélation divine. Ces énoncés ne sont pas seulement méthodologiques ou épistémologiques ; ils sont ontologiques. En effet, l’homme pose des questions parce qu’il est question ; la structure même son être est celle de la demande[41] . Dieu apporte la réponse parce qu’il est réponse [42]. Questions et réponses ne relèvent pas simplement de leur activité ; elles appartiennent à leur essence.

La bipolarité de la question et de la réponse

La réponse ne prend sens ou n’est vraiment « réponse » que dans sa rencontre avec une question ; réciproquement, la question ne se pose ou n’est vraiment question qu’en lien avec une réponse. D’une part, une question suppose ou présuppose une possible réponse qu’elle porte en elle-même, non pas comme une possession secrète, mais sous forme d’un manque (le manque est en même temps une absence et une présence). D’autre part, toute réponse suppose ou présuppose une question qui la fait surgir et la détermine ; elle n’en est pas indépendante, même si on ne peut pas déduire la réponse de la question. De plus, la réponse n’étanche, n’épuise ni n’assèche la question ; elle n’en épouse « pas purement et simplement l’espace », comme l’écrit Benoit Mathot [43]. Elle porte en elle une lacune ou un déficit qui fait rebondir l’interrogation. La question est habitée par l’anticipation d’une réponse et la réponse transforme et renouvelle la question sans l’éliminer. Celui qui questionne à la fois «n’a pas et a » ; celui qui répond à la fois « a et n’a pas »[44] . Qu’il y ait un manque dans la réponse ne signifie pas que Dieu (qui est la réponse) serait en lui-même insuffisant, mais doit se comprendre à la lumière de la parole de Jésus, la première qu’il prononce selon Marc (Tillich la cite souvent) : « le Royaume de Dieu s’approche », autrement dit, « il est là et il n’est pas là » [45]. Il vient, il s’annonce, il se prépare. Il a une certaine présence puisqu’il « s’approche », autrement dit, il se manifeste et agit. Cette présence, toutefois, n’est pas totale. Il « s’approche », autrement dit, il est toujours en route, jamais arrivé. On le sent, on l’aperçoit, il nous touche ; pourtant on ne le tient (ou ne le détient) pas, on continue à l’attendre. Dieu est la réponse, mais la réponse n’est pas complètement donnée ; elle garde toujours une dimension eschatologique [46] et est donc inépuisable : on ne la possède pas, on l’attend [47].

Entre la question et la réponse, il n’y a pas l’extériorité d’un face à face ; il n’y a pas, non plus, un enchaînement à sens unique, et encore moins une identité. L’une n’est ni le préalable ni la suite, ni le doublet ou le calque de l’autre. Elles vont ensemble, elles se constituent mutuellement en question et en réponse et, du début à la fin ou de part en part, n’existent que l’une par l’autre sans pour cela se confondre. Elles ont une sorte d’immanence mutuelle dans leur distinction même [48]. Ainsi, chez Calvin, la gloire de Dieu (qui se situe plutôt du côté de la réponse) n’apparaît qu’en contraste avec la misère de l’homme (qui relève plutôt de la question) et la misère de l’homme n’apparaît que par confrontation avec la gloire de Dieu[49]. Toute question est habitée par une réponse dont elle a une intuition confuse ; sans cela il serait impossible de la poser ; quand on interroge, on a au moins une pressentiment, une amorce ou un soupçon de ce qu’on demande, sinon on ne pourrait même pas le demander. À l’inverse, répondre à une question ne signifie pas la fermer, l’éliminer en tant qu’interrogation, mais la reposer autrement. La réponse relance l’interrogation, la fait rebondir, la déplace ; elle ne la clôt pas, elle la fait avancer. Aussi, la corrélation est-elle « une tâche infinie » [50] sans terme ni aboutissement, parce qu’elle n’est pas seulement un chemin vers la connaissance de la réalité, elle est la structure même de la réalité connue.

La corrélation, telle que la comprend Tillich, met en œuvre une logique qu’il faut distinguer de celles qui sous-tendent la dialectique et le paradoxe[51]. Dans un schéma de type dialectique, les pôles distincts et contraires entrent (ou on peut les faire entrer) dans un processus qui conduit à une synthèse où ils sont englobés dans une unité supérieure (la synthèse) de telle sorte que leur contraste est assumé et dépassé ; si elle parvient à son terme, la dialectique aboutit à « une union sans séparation ». Un schéma de type paradoxal suppose entre les pôles une incompatibilité telle qu’il ne peut y avoir entre eux que rupture, discontinuité, absence de toute relation (même s’ils coexistent, voire coïncident) ; les deux pôles se superposent ; ils sont vrais l’un et l’autre, bien que contradictoires, et il n’y a pas d’échange entre eux ; on a « une séparation sans union » [52]. La logique bipolaire est proche de la dialectique, en ce sens que les deux pôles interfèrent et se transforment mutuellement ; aussi Tillich peut-il écrire que sa théologie est « véritablement dialectique » (plus que celle de Barth dans sa maturité) ou, comme il le précise à la page suivante, « néo-dialectique »[53]. La logique bipolaire est également proche du « paradoxe » en ce sens que les deux pôles restent irréductiblement différents l’un de l’autre et ne fondent pas dans une « synthèse» ; Tillich considérera toujours que le christianisme, et plus précisément la christologie, implique fondamentalement un « paradoxe » (il est vrai que le sens de « paradoxe » varie sous sa plume, comme il le reconnaît en répondant à un article de Lewis Ford [54]). Néanmoins, les logiques dialectique et paradoxale, tout en ayant chacun une part de vérité, méconnaissent la tension dynamique, faite d’opposition et d’alliance, entre deux pôles qui à la fois s’impliquent et se contestent mutuellement dans une confrontation vivifiante. Elles échouent à saisir la réalité ou l’être dans sa vie propre ; les mots « vie » et « vivant » reviennent fréquemment sous la plume de Tillich dans ce contexte. « L'identité totale et la séparation totale, écrit-il, nient, toutes les deux, la vie ». La corrélation se caractérise par « une interdépendance vivante entre question et réponse, entre réponse et question » [55]. Elle manifeste la vie qui anime et caractérise l’être ou la réalité. « Tout processus vital comporte des mouvements où ces éléments [les éléments structuraux de l'être] divergent et convergent, se séparent et se réunissent simultanément. Quand il y a séparation sans union ou union sans séparation, la vie cesse. »[56].

La corrélation entend frayer une voie qui évite tout autant une « synthèse trop rapide » (tentation de la dialectique) qu’une « diastase impossible » [57] (tentation du paradoxe). Elle correspond à une ontologie du vivant pour laquelle des mouvements et des échanges tissent le réel ou l’être. On peut se demander si, ainsi comprise, on peut encore à juste titre la qualifier de « méthode ». À quoi on répondra « oui », en rappelant que pour Tillich, nous l’avons noté en commençant, la méthode n’est pas un outil pour acquérir de nouvelles connaissances, mais une manière d’exposer, d’expliquer, d’analyser et de vérifier ce qui a déjà été découvert. Elle ne précède pas ni ne conditionne notre accès aux réalités, elle le suit et le décrit ; elle ne conduit pas vers une conception de l’être, elle en découle, en montre les grandes lignes et les articulations.

La nature apologétique de toute théologie

Dans des articles publiés en 1941 et 1947 [58], Tillich distingue deux types de théologie. Il nomme la première kérugmatique (allusion au mot kérugme qui désigne dans le Nouveau Testament le message évangélique) et la seconde apologétique. En 1941, il la qualifie plutôt de philosophique que d’apologétique, en se référant à l’intitulé de la chaire qu’il occupe à Union Seminary de New-York : « théologie philosophique ». Il y a sans doute là un reprise et une modification de la distinction entre « théologie de la culture » et « théologie d’Église » qu’on trouve dans la conférence, souvent citée, qu’il a prononcée en 1919 à la Société kantienne de Berlin.[59]

La théologie kérugmatique - à distinguer du fondamentalisme malgré des proximités[60] - tente de « reproduire le contenu du message chrétien de manière ordonnée et systématique sans se référer à la philosophie » ; elle le fait « soit dans des termes à prédominance biblique, soit dans des termes empruntés à la tradition classique » (on a bien une théologie d’Église). La théologie apologétique ou philosophique tente d’expliquer (et pas, ou pas seulement, de « reproduire ») ce même contenu en interrelation avec « les interprétations préphilosophiques et philosophiques de la réalité » (il s’agit bien d’une théologie de la culture). Notons que, comme le montre bien Benoit Mathot[61], Tillich, dans la période américaine, dépasse la conception de l’apologétique qui y voit un combat ou une polémique contre un adversaire ; il la conçoit désormais comme un débat ou un dialogue.

Dans l’article de 1941, Tillich soutient que ces deux théologies sont complémentaires, s’appellent l’une l’autre et que l’Église a besoin des deux. Il n’y emploie pas le mot « corrélation ». Il aurait pu le faire en le prenant au premier des sens qu’il distingue, celui de « correspondance de différentes séries de données ». Il y considère que la démarche déductive de la théologie kérugmatique et la démarche corrélative de la théologie apologétique s’additionnent et se complètent. Leur dualité est « naturelle » et bénéfique : « la tension et la fertilisation mutuelle de ces deux types est un événement essentiel et heureux dans toute l’histoire de la pensée chrétienne ». Il paraît évident qu’ici Tillich a le souci de défendre la légitimité d’une chaire dont l’intitulé devait désagréablement sonner aux oreilles des protestants orthodoxes et barthiens [62] (et aussi de quelques philosophes); il veut montrer qu’elle a pleinement sa place dans une Faculté de Théologie à côté et en complément des chaires bibliques et dogmatiques à l’enseignement plus traditionnel.

Au tout début du premier volume de la Théologie systématique, après avoir noté que sans des « réactions kérugmatiques », la théologie « se perdrait dans les relativités de la situation », Tillich affirme que « la théologie kérugmatique a besoin d’une théologie apologétique qui la complète »[63], ce qui semble aller dans le sens de deux démarches distinctes qui se rejoignent et se corrigent mutuellement. Mais, déjà dans l’article de 1941 et plus nettement dans l’introduction de la Théologie systématique, il atténue, dépasse et finit par abandonner l’idée de deux méthodes additionnelles également légitimes. Il souligne la totale impossibilité d’une théologie purement kérugmatique (même Barth, son représentant contemporain le plus remarquable, n’y parvient pas [64]) cohérente avec ses propres principes : qu’elle le veuille ou non, qu’elle en ait conscience ou non, elle ne peut pas éviter d’utiliser les « outils conceptuels » et le langage de son époque, et elle doit aussi tenir compte de la situation historique des livres bibliques [65]. Elle est donc sourdement ou clandestinement corrélative : elle ne se contente pas, ce qui est une impossibilité, de « reproduire » ; inévitablement, elle « explique » et interprète le donné révélé en l’inscrivant, consciemment ou non, dans un contexte culturel précis qui en détermine le sens. Certes, l’apologétique doit tenir compte de l’avertissement kérugmatique et ne pas dégénérer en théologie purement inductive ou naturelle, ce qui entrainerait « une dissolution du message chrétien » [66]. Elle n’en demeure pas moins « un élément omniprésent et non une section particulière de la théologie systématique » [67]. Elle n’est pas un chapitre particulier de la théologie à côté de la dogmatique ou des disciplines bibliques ; elle est la théologie tout entière et, même quand il s’en défend, inévitablement le théologien est apologète. De même la méthode corrélative n’est pas une méthode avec et en complément d’autres (la déductive ou l’inductive), mais l’unique démarche qu’on puisse qualifier à juste titre de théologique, parce qu’elle seule honore tout autant la divinité de Dieu que l’humanité de l’homme. On l’applique forcément, qu’on le veuille et qu’on en ait conscience ou non. Il n’y a pas d’autre démarche vraiment croyante au sens biblique du terme. L’ontologie qu’implique fondamentalement la foi chrétienne l’impose.

André Gounelle
Professeur émérite de la Faculté de Théologie Protestante de Montpellier



[1] Systematic Theology 1 (1951), The University of Chicago Press, p. 8, 34, 59-60.

[2] « The Problem of Theological Method » (1947), MWHW 4, p. 301. Systematic Theology 1 (1951), p. 8. Love Power an Justice (1954), MWHW 3, p. 595. L’abréviation MWHW renvoie à Paul Tillich, MainWorks/Hauptwerke, Walter de Gruyter, 6 volumes.

[3] MWHW 4 ; cet article a été repris dans The Protestant Era (1948).

[4] « The Protestant Era. Author’s Introduction » (1948), MWHW 6, p. 300.

[5] « The Problem of Theological Method » (1947), MWHW 4, p. 310. « Authority and Revelation » in Official Register of Harvard University, 1952, p. 32.

[6] On trouve aussi surtout dans la période allemande « réalisme croyant », opposé au « réalisme incroyant » et à « l’idéalisme croyant mais utopique » (Die religiöse Lage der Gegenwart, 1926, MWHW, 5, p. 80) - encore qu’on ne puisse pas à proprement parler qualifier l’idéalisme de « croyant », car ce que la foi a de spécifique lui est étranger (« Gläubiler Realismus », 1927 et « Uber glaübigen Realismus », 1928, MWHW, 4, p. 190, 194).

[7] Voir « The Problem of Theological Method » (1947), MWHW 4, p. 312. « The Protestant Era. Author’s Introduction » (1948), MWHW, 6, p. 299-300. Systematic Theology 2 (1957), p. 5-7. Dans tous ces textes la mention de l’opposition entre naturalisme et supranaturalisme précède un exposé sur la méthode de corrélation.

[8] Die religiöse Lage der Gegenwart (1926) MWHW 5, p. 34.

[9] Systematic Theology 2 (1957), p. 7.

[10] Systematic Theology 2 (1957), p. 6.

[11] Est visé ici le Barth d’avant la publication de L’humanité de Dieu, (1956) qui atténue, voir rectifie ses propos antérieurs sur ce point. Tillich a toujours été très nuancé dans sa critique de Barth. Dans Systematic Theology 1 (1951), p. 5, à propos justement de la théologie kérugmatique, il écrit : « La grandeur de Barth lui vient de ce qu’il se corrige sans cesse à la lumière de la "situation" et qu’il s'efforce vigoureusement de ne pas devenir son propre disciple ».

[12] Adolf von Harnack, Marcion, l’évangile du Dieu étranger (1921, 1924), traduction française au Cerf. Tillich cite ce livre dans A History of Christian Thought, Simon and Schuster, 1972, p. 34 ; aux p. 34 et 44, il rapproche Marcion et Barth dans leur insistance sur l’étrangeté de Dieu. Dans « The Two Types of Philosophy of Religion » (1946, repris dans Theology of Culture, 1959), MWHW, 4, p. 289, Tillich écrit que le type cosmologique de philosophie de la religion, qui est un supranaturalisme, nous présente un Dieu « étranger ».

[13] Systematic Theology 1 (1951), p. 65.

[14] « The Problem of Theological Method » (1947), MWHW 4, p. 312.

[15] Systematic Theology 2 (1957), p. 7. Dans « The Recovery of the Prophetic Tradition in the Reformation » (1950), MWHW 6, p. 331, Tillich se réfère au premier chapitre de l’ Institution de la Religion chrétienne de Calvin qui a pour titre : « Comment la connaissance de Dieu et de nous sont choses conjointes et du moyen de cette liaison ». Dans « The Problem of Theological Method » (1947), MWHW 4, p. 310, Tillich mentionne la phrase de Luther : « comme tu crois, ainsi tu as ».

[16] Systematic Theology 2 (1957), p. 16.

[17] Systematic Theology 1 (1951), p. 237-238.

[18] « Religion as a Dimension in Man’s Spiritual Life (1955) in Theology of Culture, Oxford University Press, 1959. « The Depth of Existence » (1944) in The Shaking of the Foundations, Scribner, 1948.

[19] Systematic Theology 2 (1957), p. 7.Biblical Religion and the Search for Ultimate Reality, MWHW 4, p. 388, attribue la formule « plus proche de moi » à Luther. Dans « Philosophy and Theology » (1941), MWHW 4, p. 281, Tillich écrit : « la question d’une philosophie première et fondamentale est celle de ce qui est plus près de nous que quoi que ce soit d’autre ».

[20] « Réciprocité » et « autonomie » sont les termes que choisit John Clayton dans The Concept of Correlation, Walter de Gruyter, 1980, ch. 2, pour caractériser ce qu’il appelle le « dilemme de Schleiermacher » que, selon lui, Tillich entend résoudre par la notion de la corrélation.

[21] Paul Tillich, « Reply to interpretation and criticism » in Charles Kegley et Robert Bretall (éd.), The Theology of Paul Tillich, Macmillan, 1952, p. 336-337 (« distinction constitutive » traduit definitory distinction).

[22] Rudolf Bultmann, Foi et compréhension, Seuil, v. 1, 1970 (l’article ainsi intitulé date de 1946).

[23] Gabriel Vahanian, La condition de Dieu, Seuil, 1970.

[24] Systematic Theology 1 (1951), p. 211 ; voir aussi p. 12. Cf. Religionsphilosophie (1925), MWHW 4, p. 145.

[25] Systematic Theology 1 (1951), p. 61. Tillich note le désaccord profond de Barth sur ce point.

[26] The Shaking of the Foundations , Scribner (1948), p. 57. Dynamics of Faith (1957),MWHW 5, p. 252. The God above God (1961), MWHW 6, p. 418-419.

[27] Systematic Theology 1 (1951), p. 62 (phrase qui montre bien que relation et corrélation ne sont pas des synonymes). Dans « The Recovery of the Prophetic Tradition in the Reformation » (1950), MWHW 6, p. 331, Tillich intitule le paragraphe consacré à Calvin : « la corrélation de Dieu et de l’homme » Cf. Systematic Theology 1 (1951), p. 63.

[28] Systematic Theology 1 (1951), p. 168-171. The Courage to Be (1952), MWHW 5, p. 72.

[29] Systematic Theology 1 (1951), p. 8. Systematic Theology 2 (1957), p. 16.

[30] Systematic Theology 1 (1951), p. 8-9, p. 64-65.

[31] Tillich se sert de l’opposition « d’en haut » et « d’en bas » pour caractériser deux démarches philosophiques, Systematic Theology 1, 1951, p. 19 ; elle a été utilisée par d’autres dans le domaine de la théologie en particulier dans les années 1960. Elle a une valeur limitée : Systematic Theology 2 (1957), p. 8, note que les catégories spatiales sont « impropres à exprimer la véritable relation entre Dieu et l’homme qui n’est pas spatiale. »

[32] Par exemple, 1, p. 62, le début du dernier alinéa.

[33] « Communicating the Christian Message » (1952) et « A Theology of Education » (1957) repris dans Theology of Culture, Oxford University Press, 1959. « The Relevance of the Ministry in Our Time and Its Theological fondation » (1960) publié en traduction française dans Substance catholique et principe protestant , Cerf, Labor et fides, Presses de l’Université de Laval, 1995. The Irrelevance et Relevance of the Christian Message (1963), The Pilgrim Press, 1996. Notons qu’à l’exception de « A Theology of Education » qui l’emploie une fois, le terme de « corrélation » n’apparaît pas dans ces articles.

[34] Systematic Theology 1 (1951), p. 60 ; 2 (1957), p. 13.

[35] Systematic Theology 1 (1951), p. 65.

[36] Systematic Theology 1 (1951), p. 8.

[37] Systematic Theology 2 (1957), p. 13.

[38] Esquisse d’une christologie (1964), traduction française, Cerf, p. 32-33 note.

[39] Systematic Theology 2 (1957), p. 14.

[40] Voir André Gounelle, « Philosophie de la religion et méthode de corrélation chez Paul Tillich », Laval Théologique et Philosophique, vol. 65, n° 2, juin 2009. Je ne reprends pas ici l’analyse plus détaillée que je fais dans cet article des deux modalités de la méthode de corrélation qu’on distingue habituellement (et qu’on peut discuter) : la corrélation de la substance et de la forme, la corrélation de la question et de la réponse.

[41] Systematic Theology 1 (1951), p. 62. Systematic Theology 2 (1957), p.13.

[42] Systematic Theology 1 (1951), p. 163, 211 ; j’ai eu tort de traduire à la p. 163 : « Dieu apporte la réponse » (Théologie Systématique 2, Cerf, Labor et fides, P.U.L., 2003, p. 11) ; l’anglais dit bien « God is the answer ».

[43] Benoit Mathot, L’Apologétique dans la pensée de Paul Tillich, De Gruyter, 2015, p. 175 ; cf. ibid., p. 167-168.

[44] Biblical Religion and Search for the Ultimate Reality (1955), MWHW 4, p. 380 ; Tillich écrit exactement (phrase mise en italique) : « le philosophe n’a pas et a ; le croyant a et n’a pas ».

[45] « What is Wrong with the “Dialectic” Theology ? », Journal of Religion, 1935, p. 143.

[46] « The Kindgom of God and History » (1938) in Theology of Peace (R.H. Stone ed.), Westminster/John Knox, 1990, p. 35. « History as the problem of our period » (1939) in MWHW 6, p. 232.

[47] The Shaking of the Foundations (1948), Charles Scribner’Sons, p. 149-151.

[48] « Natural and Revealed Religion » (1935), in MWHW 6, p. 220 ; « What is Wrong with the “Dialectic” Theology ? » in The Journal of Religion, avril 1935, p. 137.

[49] Systematic Theology 1 (1951), p. 63. « The Recovery of the Prophetic Tradition in the Reformation » (1950), MWHW 6, p. 331.

[50] Biblical Religion and the Search for Ultimate Reality , MWHW 4, p. 388.

[51] Je prends ces deux mots au sens que Tillich leur donne dans les premières lignes de « What is Wrong with the “Dialectic” Theology ? » in The Journal of Religion, avril 1935. Il est clair qu’il s’agit d’une définition élémentaire qui ne prend pas en compte, comme le fait ailleurs Tillich (voir, par exemple,Systematic Theology 1 (1951), p. 56-57 et Systematic Theology 2 (1957) p. 90-92), leur richesse de sens et de contenu dans l’histoire de la pensée en général et de la théologie en particulier.

[52] Systematic Theology 1 (1951), p. 242.

[53] The Protestant Era. Author’s Introduction (1948) in MWHW 6, p. 300, 301.

[54] « Rejoinder » in The Journal of Religion, 1966, p. 187. Dans Systematic Theology 2 (1957), p. 90-92, après avoir noté l’imprécision de ce concept, Tillich définit le paradoxe comme ce qui va contre l’opinion commune (née de l’expérience ordinaire), alors qu’il donne, me semble-t-il, un autre sens (celui de « l’impossible possibilité ») à « paradoxe » dans ses débats avec Barth en 1923 (MWHW 4, p. 91-112) ou dans « What is Wrong with the “Dialectic” Theology ? » in The Journal of Religion, avril 1935.

[55] « Natural and Revealed Religion » (1935), in MWHW 6, p. 221.

[56] Systematic Theology 1 (1951), p. 242.

[57] « The Présent Theological Situation in the Light of the Continental European Development », Theology Today, 1949, p. 305.

[58] « Philosophy and Theology » (1941), MWHW 4, p. 279-280. « The Problem of Theological Method » (1947), MWHW 4, p. 310.

[59] MWHW , 2, p.81-85. On peut évoquer aussi une lettre de 1922, où Tillich évoque un « pacte » conclu entre le théologien de la culture qu’il est et le théologien de la Bible qu’est Barth ; ils auraient convenu que chacun, dans son domaine propre, proclamera « l’essence de l’inconditionné », voir Werner Schüssler, « Paul Tillich et Karl Barth : leurs premiers échanges dans les années 20 », Laval théologique et philosophique, juin 1988, p. 146.

[60] Systematic Theology 1 (1951), p. 4.

[61] Benoit Mathot, L’Apologétique dans la pensée de Paul Tillich, De Gruyter, 2015, p. 156-157.

[62] « Philosophy and Theology » (1941), MWHW 4, p. 279.

[63] Systematic Theology 1 (1951), p. 6.

[64] Systematic Theology 1 (1951), p. 5.

[65] Systematic Theology 1 (1951), p. 7, 21. Voir aussi les remarques, p. 29, sur l’ « immanence réciproque » de l’historique et du systématique, et « Philosophy and Theology » (1941), MWHW 4, p.280.

[66] Systematic Theology 1 (1951), p. 5-8.

[67] Systematic Theology 1 (1951), p. 31.

 

André Gounelle

Professeur émérite de la faculté de théologie protestante de Montpellier

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