signature

Recherche sur AndréGounelle.fr :


Accueil > Théologie des religions

Théologie des religions

Les pluralismes avec norme 
Première partie : religions et éthique selon Albert Schweitzer

Malgré sa notoriété, on connaît peu ou mal Albert Schweitzer (1875-1965). Tout le monde a entendu parler de Lambaréné, et on a porté sur son action des jugements contrastés, tantôt louangeurs et positifs, tantôt critiques et négatifs, mais en général peu informés. On a réduit Schweitzer à la médecine humanitaire, en oubliant qu’il est aussi théologien, philosophe, et également musicien. Son œuvre ne se résume pas à son hôpital. Il compte tout autant par ce qu’il a dit et écrit que parce qu’il a accompli.

1. Les grands thèmes de la pensée de Schweitzer

Schweitzer a beaucoup réfléchi sur la religion et sur les religions, mais avant de voir ce qu’il en dit et pour le bien comprendre, il faut nous arrêter sur les deux thèmes qui dominent et structurent sa pensée, à savoir l'eschatologie du Nouveau Testament et le principe du respect de la vie.

1. Évangile et eschatologie

De 1894 jusqu'en1910, Schweitzer se consacre à l'étude du Nouveau Testament. Durant ses études de théologie, il avait eu le sentiment que les spécialistes n'accordaient pas une attention et une importance suffisantes aux paroles de Jésus sur le Royaume. Il examine dans cette perspective les évangiles (il s'occupera plus tard de Paul*). Il aboutit à la conclusion que la prédication de Jésus a pour contenu essentiel et pour centre l'eschatologie. Elle proclame la disparition prochaine du monde actuel et la venue d'un monde nouveau (le Royaume de Dieu). La fin imminente du temps présent et l'arrivée à brève échéance d'une époque radicalement différente, voilà le message dont Jésus s'estime porteur et qu’il proclame.

Selon Schweitzer, trois convictions animent les propos et l'action de Jésus. D'abord, que le Royaume ne s'établira pas progressivement, à la suite et en aboutissement d'un long processus, mais qu'il arrivera d'un coup, dans une mutation subite à travers une catastrophe apocalyptique. Ensuite, que la venue du Royaume ne saurait tarder ; elle se produira à bref délai, dans un avenir très proche, dans un futur presque immédiat. Enfin, Jésus pense que la venue du Royaume découlera de son action. Ses paroles et gestes auront pour effet de la provoquer. Il a le sentiment de jouer un rôle décisif dans le surgissement attendu du monde nouveau.

Ces thèses, exposées dans plusieurs publications entre 1902 et 1906, provoquent un tollé général. On a recensé les compte rendus de ses livres dans les revues de l'époque ; aucun n'est favorable . Schweitzer apparaît dans le monde théologique comme un isolé et un excentrique qui fait l'unanimité contre lui. On lui reproche de ruiner l'autorité de Jésus, en le présentant comme un prédicateur apocalyptique, en prétendant qu'il s'est trompé sur la date de la fin, en lui attribuant un message irrecevable par les modernes, en faisant de lui un homme de son temps et non de tous les temps.

Peu à peu, les idées de Schweitzer feront leur chemin et s'imposeront. Son apport marque un tournant dans la recherche et la réflexion théologiques. En mettant en évidence « l'étrangeté » de Jésus aussi bien par rapport aux catégories dogmatiques traditionnelles qu'aux représentations et mentalités modernes, Schweitzer souligne la distance culturelle qui nous sépare du Nouveau Testament. De ce fait, il soulève le problème qui va beaucoup préoccuper la théologie de notre siècle : celui de l'herméneutique. On ne peut pas se contenter de faire de l'exégèse, de commenter et de répéter le Nouveau Testament. Il ne suffit pas d'établir ce que Jésus a vraiment dit. Il faut se demander également comment interpréter, assimiler, faire nôtre l'enseignement de Jésus. De quelle manière le traduire et le transposer dans notre monde ?

2. Le respect de la vie

À côté de son travail d’exégète, Schweitzer mène une réflexion philosophique et éthique. Le monde dans lequel il vit le préoccupe. L'évolution de la civilisation occidentale, surtout après la guerre 14-18, l'inquiète. Il a le sentiment que la culture européenne entre dans une période de décadence et de décomposition morale. Il veut réagir et il se demande quels principes doivent orienter notre vie et guider nos activités. Il se met en quête de vérités fondamentales que tous puissent comprendre et appliquer. Il critique les philosophes qui jouent avec des concepts « sans rapport avec la vie »*. Ils trahissent leur responsabilité civique et sociale quand ils n’ont plus le souci de s’adresser à tous et d’apporter une réflexion susceptible d'éclairer et d'orienter leur existence.

Schweitzer cherche une formule qui soit en même temps simple, profonde et pratique. Elle s’impose à lui au cours d'une lente navigation sur l'Ogoué. Selon son habitude il utilisait ses journées de voyage pour travailler intensément. Laissons-le raconter cette découverte :

 « Le soir du troisième jour alors que nous avancions dans la lumière du soleil couchant, en dispersant au passage une bande d'hippopotames, soudain m'apparurent sans que je les eusse pressentis ou cherchés les mots : respect de la vie. La porte d'airain avait cédé. La piste s'était montrée à travers le fourré ».

Sur ce principe du respect de la vie, il faut donner trois précisions.

1. D’abord, « respect » ne désigne nullement une attitude passive de non-intervention qui se bornerait à laisser vivre ce qui vit, à s'abstenir de tuer, de nuire aux végétaux, aux animaux et aux humains. Respecter la vie veut dire la servir, la favoriser, combattre ce qui la menace et l'agresse. Schweitzer appelle à des efforts, à un engagement et à une lutte.

2. Ensuite, Schweitzer a un sens aigu de l'interférence étroite et constante entre la vie et la mort. La mort alimente la vie. Chaque existence entraîne quantité de morts sans lesquelles elle disparaîtrait. Cette interdépendance crée une ambiguïté tragique. La vie associe toujours deux aspects. Infiniment précieuse et infiniment redoutable, elle suscite joie et chagrin, espoir et inquiétude, émerveillement et horreur. Elle apporte et comporte le meilleur comme le pire. En choisissant de la servir, on fait le pari que le positif peut l'emporter sur le négatif. Le respect de la vie ne nie pas ni n'oublie le négatif. Il s'efforce de le surmonter dans un acte de foi et de courage.

3. Enfin, Schweitzer ne présente pas le principe du respect de la vie comme une recette magique qui résoudrait tous les problèmes et dicterait automatiquement ce qu'il faut faire. Il y voit plutôt l'indication du sens dans lequel il faut chercher des solutions, de la direction à partir de laquelle on doit inventer des comportements. Ce principe nous met au travail. Il nous invite à réfléchir et à agir en nous donnant une orientation. Il nous appartient, dans chaque situation, d'en discerner la juste application.

2. L'approche des religions non chrétiennes

Après avoir indiqué ces deux grands thèmes, j’en arrive à notre sujet précis, les religions non chrétiennes. Comment Schweitzer rencontre-t-il ce problème et dans quel esprit l'aborde-t-il ?

1. Les raisons d'un intérêt

À partir de 1922, il s'intéresse de plus en plus à la spiritualité orientale. Il étudie les philosophies, les sagesses et les religions d'abord de l'Inde, ensuite de la Chine. Cette nouvelle orientation de ses travaux répond à une logique profonde. Après avoir pris conscience de l'échec de la civilisation occidentale, rendu évident par la guerre 14-18, il se demande si on ne peut pas trouver en Orient une vision du monde et une éthique qui fonctionneraient mieux que les européennes, qui donneraient de meilleurs résultats et qu'on pourrait adopter.

La question se pose d'autant plus qu'après la première guerre mondiale, les spiritualités orientales deviennent à la mode et attirent beaucoup de monde. Les religions d'Asie, naguère lointaines et exotiques, se rapprochent du monde européen, lui deviennent familières et l'attirent d'autant plus qu'il traverse une crise. La guerre l'a fait douter de lui-même et de sa supériorité. Il découvre qu'il ne possède pas toutes les vérités et ne connaît pas toutes les réponses. Dans ce contexte, comment ne pas se demander si d'autres religions n'ont pas ce dont l'Europe éprouve le manque  ?

2. Quelles religions ?

Cette motivation explique que Schweitzer étudie certaines religions et pas d'autres. Il s'occupe de celles qui lui semblent susceptibles de réunir l'humanité autour de valeurs communes, et de représenter une force réelle dans le monde moderne.

Ainsi, ses travaux ne portent pas sur les religions africaines. Il faut dire qu'il ne connaît de l'Afrique que la région de Lambaréné, où vivent à cette époque des tribus passablement déculturées par suite de guerres et de migrations antérieures à l'époque coloniale. De plus, Schweitzer travaille toujours sur des livres, des écrits. Or, les religions africaines sont orales et il n'existe pas à cette époque d'ouvrages sur elles. Schweitzer rend parfois hommage à la spiritualité et à la sagesse de certains des africains qu'il rencontre, mais ne dit rien de leurs religions.

De même, il écarte l'Islam que, comme la plupart des européens d'alors, il juge très sévèrement. Il y voit une religion sur le déclin, « sans originalité » et dépourvue « de pensées profondes sur Dieu et l'univers » (appréciation tout à fait injuste). Il ne mentionne à peine le judaïsme, à cette époque-là très replié sur lui-même, qui ne cherche pas à sortir de son ghetto pour s'exporter.

Par contre, Schweitzer s'arrête longuement sur les religions de l'Inde ou de la Chine. Ce choix, qu'on pourrait à première vue juger arbitraire et subjectif, s'explique par la préoccupation qui suscite la recherche de Schweitzer : vers où les gens se tournent-ils pour trouver une sagesse qui les aide à vivre dans un monde déboussolé ?

3. Pas de privilège pour le christianisme

Dans sa recherche, Schweitzer refuse d'affirmer d'emblée, a priori, comme un postulat, la vérité et la supériorité de la foi chrétienne. Cette démarche ne lui convient pas parce qu'elle présuppose résolu le problème qui surgit. Elle se donne au départ ce qu'il s'agit de montrer. Elle implique un refus de discussion, un renoncement à l'enquête ; elle frise cette sorte de malhonnêteté intellectuelle qui préjuge du résultat. Peut-être même, faut-il y voir un manque de confiance dans la puissance de l'évangile. Plutôt que de le confronter avec les autres religions, on préfère le mettre à l'abri. On se retire ainsi, écrit Schweitzer, « sur une montagne fortifiée, certes inexpugnable, mais d'où on ne peut exercer aucun pouvoir » . Il estime que le christianisme ne doit « revendiquer aucun privilège, mais prendre part au combat des idées, en ne comptant que sur la force de sa vérité intrinsèque ». La vérité et la pertinence du christianisme ne vont pas de soi et posent problème. On ne peut pas le soustraire à l'examen et au questionnement critiques.

4. Une perspective pratique

Quand Schweitzer étudie les religions, il ne le fait pas de manière désintéressée ou gratuite, pour le plaisir de la connaissance et de la réflexion. Il poursuit un but essentiellement pratique. Il s'efforce de discerner sinon la vraie religion, du moins la meilleure, celle qui répond le mieux aux besoins de l'humanité, celle qui peut le plus utilement inspirer et guider sa marche. Schweitzer ne s'interroge pas sur la nature ou l'essence de la religion, mais sur ce qu'elle apporte aux êtres humains, sur ce qu'elle opère en eux, sur les comportements qu'elle entraîne, sur les conséquences concrètes de ce qu'elle enseigne.

Pour Schweitzer, toute religion remplit deux fonctions*.

Premièrement, elle donne une explication de l'univers. L'être humain a conscience d'être entouré de ténèbres. Il se trouve confronté avec les contradictions de l'existence à la fois merveilleuse et horrible, et avec celles du monde tantôt logique et rationnel, tantôt insensé et absurde. Il ne comprend pas, et sent perdu. La religion lui fournit une « conception du monde » et lui offre des points de repères dans ses incertitudes et ses obscurités.

Deuxièmement, elle indique une direction, et donne des directives. L'être humain décide en partie de l'orientation de sa vie. Il a la capacité certes limitée, néanmoins effective, d'opérer des choix personnels, d'agir comme il l'entend. Comment se déterminer ? Où se trouvent la vérité et l'erreur, le bien et le mal ? La religion le lui dit et lui propose « une conception de la vie », autrement dit une éthique.

Quand il étudie une religion, Schweitzer se pose donc deux questions. D'abord, permet-elle de comprendre l'univers et la destinée humaine, propose-t-elle un enseignement cohérent et satisfaisant, qui corresponde à notre expérience ? Ensuite, à quelles attitudes et actions concrètes conduit-elle ? Pour quelles causes mobilise-t-elle et jusqu'à quel point ? Sert-elle vraiment la vie ? Une religion s'évalue en fonction du service qu'elle rend aux êtres humains. Il ne faut pas en faire une fin en soi, ni lui attribuer une valeur suprême, en lui subordonnant tout le reste. Elle est plutôt un moyen ou un instrument dont il faut jauger l'efficacité. La religion n'incarne pas l'ultime ; elle offre un chemin pour une vie où se reflète et qu'anime l'ultime.

3. Les éléments constitutifs des religions

Dans les religions qu'il étudie, Schweitzer distingue trois éléments*. D'abord, leur dogmatique ou leur explication du monde. Ensuite, leur mystique ou leur piété. Enfin leur éthique, ou l'orientation pratique et concrète de la vie qu'elles proposent. À ces trois éléments, on pourrait en ajouter un quatrième, le rite ou le culte ; Schweitzer le mentionne quelquefois, mais en parle très peu ; je le laisse donc de côté.

1. La dogmatique

Schweitzer se montre en général d'une extrême sévérité pour les systèmes dogmatiques. Il y voit des affirmations sans fondement solide ni vérification possible. Très marqué par Kant, il souligne que le savoir humain a des limites et que bien des choses lui échappent, en particulier la raison ultime des choses et les réalités dernières . Nous devons reconnaître notre ignorance, l'accepter, et « nous avouer à nous-mêmes que nous ne comprenons rien à la marche du monde, que nous sommes de tout côté entourés d'énigmes »*.

On ne peut pas échapper aux incertitudes de l'agnosticisme en faisant appel à une révélation surnaturelle qui viendrait fonder un savoir. Rien ne permet d'authentifier l'origine transcendante dont se réclament certaines religions. En fonction de quel critère affirmer que Dieu se révèle ici et non là ? Ceux qui le font tombent dans l'arbitraire et l'injustifiable. On ne peut pas partir d'une invérifiable garantie divine pour asseoir l'autorité d'une religion. Selon Schweitzer, les religions, le christianisme comme les autres, se trompent et égarent quand elles estiment « avoir percé le mystère des choses et croient posséder la clef de l'énigme du monde » . L'apôtre Paul le dit très justement, « c’est partiellement que nous connaissons … nous voyons au moyen d’un miroir, d’une manière confuse »*. Ce qui signifie que « notre science, même la plus parfaite, n'est que fragmentaire ».

La comparaison entre les diverses doctrines ou les dogmatiques des diverses religions ne tourne pas à l’avantage du christianisme. L'évangile présente une conception du monde beaucoup moins élaborée et cohérente que les spiritualités d'Asie. Ainsi, il n'arrive pas à concilier l'affirmation de la toute-puissance d'un Dieu d'amour avec la souffrance et la misère que l'on constate dans le monde. Hindouisme et bouddhisme présentent sur ce point des métaphysiques beaucoup plus profondes et subtiles ; en contraste, on peut juger celle du christianisme naïve et contradictoire. Aux yeux de Schweitzer, cette infériorité constitue, en fin de compte, un mérite, car elle nous incite à l'humilité, nous détourne de toute présomption et nous rappelle à chaque instant que nous ne connaissons pas les secrets de l'univers, que nous ne disposons pas d’une explication totale de la réalité. À ses catéchumènes strasbourgeois, Schweitzer enseignait que l'évangile ne dissipe pas les énigmes de l'existence, qu’elle reste mystérieuse et incompréhensible. Plusieurs, à la fin de la guerre 1914-1918, lui en ont exprimé leur reconnaissance . Quand on se trouve aux prises avec l'horreur, quand on se heurte à l'intolérable, une religion qui explique tout devient odieuse et s'effondre.

Schweitzer disqualifie donc les dogmatismes. Pour lui, aucune théologie, aucune philosophie et aucune science ne propose une conception du monde solide et satisfaisante. Les diverses doctrines religieuses manquent de bases et ont des prétentions excessives. Il faut les renvoyer dos à dos, en accordant peut-être une légère préférence aux courants libéraux* qui ont conscience de la relativité de leurs énoncés doctrinaux.

2. La mystique

S'il récuse la dogmatique, par contre Schweitzer accorde beaucoup d'importance à la mystique ou à la piété. Elle irrigue, nourrit, anime une religion vivante. Sans elle, la religion ne serait qu'un ensemble de formes extérieures et contraignantes, et non une puissance intérieure et vivante. Là où elle disparaît, on n'a plus que le lit désolant d'une rivière asséchée. Sous la plume de Schweitzer, on rencontre souvent des métaphores fluviales qui reflètent sans aucun doute la valeur et l’importance aussi bien du Rhin pour l'Alsace que de l'Ogoué pour le Gabon.

Que faut-il entendre par mystique ? Schweitzer en parle comme d'une « vie en Dieu » . Il la qualifie d'union, ou plutôt de relation spirituelle avec l'infini (ailleurs il dit « avec l'univers »)*. Intérieurement, je me sais et je me sens appartenir à l'infini ; j'éprouve une réalité, j’expérimente une présence qui me dépasse et que je ne peux pas définir par des dogmes ou des concepts. Au début de son livre sur l'apôtre Paul*, Schweitzer écrit :

« Il y a mystique partout où un être humain considère la séparation du terrestre du temporel et de l'éternel comme vaincue, et que, tout en étant lui-même dans le terrestre et le temporel il se sent vivre intérieurement dans le supraterrestre et l'éternel ».

La mystique, telle que Schweitzer la comprend, présente trois caractéristiques.

Premièrement, elle ne consiste nullement en une évasion hors de la réalité. Elle ne fait pas entrer dans un univers spirituel distinct et séparé de celui du quotidien. Elle ne fuit pas ni n'abolit le sensible, le tangible, le terre à terre. Par contre, elle surmonte, détruit la séparation entre l'éternel et le temporel ou entre le spirituel et le matériel. Schweitzer plaide pour une « mystique de la réalité »*, qui ne dévalorise pas l'ordinaire et le banal au profit de spéculations et de rêveries. Loin de nous détourner du monde concret, la véritable mystique nous lie à lui ; elle donne du sens aux êtres et aux choses qui nous entourent, ainsi qu'à nos actions et comportements.

Deuxièmement, la mystique, telle que la comprend Schweitzer, ne s'oppose pas à la raison, elle n’a rien d’obscurantiste . Certes, la mystique consonne avec le mystère. Elle implique la perception d'une présence qui se situe au-delà de notre perception et qui dépasse notre intelligence. Toutefois, si le mystère échappe à la raison, il ne la contredit pas ni ne la détruit. Schweitzer discerne même un accord profond entre le véritable mysticisme et la raison authentique. La raison authentique, souligne-t-il, a conscience de ses limites et elle récuse le rationalisme. Elle constate, en effet, qu'elle ne peut pas étendre son empire sur l'ensemble de la réalité et que quantité de choses lui échappent. Beaucoup plus et beaucoup mieux que ceux qui la dénigrent, elle sait que des mystères entourent de toutes parts l'être humain*. De son côté, la mystique reconnaît pleinement à la raison son domaine de pertinence, sa zone de validité. Elle entend ne pas perdre le contact avec cette partie de la réalité qu’explore et que décrit la raison. Elle a besoin de la raison pour comprendre autant que faire se peut et pour agir à bon escient.

Le mysticisme relève, comme la raison, de la pensée . La pensée peut faire un mauvais usage de la raison ; c’est ce qui se passe, précisément, lorsqu’elle vide la raison de toute spiritualité, la sépare de la mystique et la réduit à une technique. Quand, au contraire, la pensée développe une raison intuitive, et pas seulement logique ou fonctionnelle, alors elle conduit au mysticisme, à cette relation profonde et élémentaire avec l'infini et avec le monde concret. Sous la plume de Schweitzer « élémentaire » n'a pas un sens péjoratif ni dépréciatif ; ce terme s'applique à une réalité existentielle antérieure à la conscience que je peux en avoir et à la réflexion que je peux mener.

Troisièmement, la mystique s'enracine dans l'intériorité. Elle n'entend pas négliger ou nier l'extériorité. Au contraire, elle vise à supprimer la séparation entre les deux domaines. Elle ne peut y parvenir qu'en structurant la personnalité, en développant la vie intérieure, en cultivant la réflexion . Schweitzer estime que dans ce domaine les religions de l'Inde ont une nette supériorité sur le christianisme. Elles ont bien vu et elles doivent nous apprendre l'importance du travail sur soi-même. Elles éduquent au recueillement, à la méditation*, alors que le monde occidental conduit à un « vide intérieur »* parce que, au nom du primat de l’efficacité, il a négligé, déconsidéré l’intériorité ; au lieu de la cultiver, il l’a asphyxiée. Il favorise et entretient une activité superficielle et épuisante, et, du coup, déshumanise l'être humain*.

4. L'éthique

Pour Schweitzer, la mystique fournit à la religion sa source et sa vie profonde. Toutefois, elle ne constitue pas le but. La mystique est plus un point de départ qu’une visée. La religion ne remplit bien son rôle et sa fonction, elle ne prend tout son sens, que lorsqu’elle débouche sur une éthique. C’est donc, après la dogmatique et la mystique, le troisième élément qui constitue la religion. Que faut-il entendre exactement pas éthique ? Sous la plume de Schweitzer, ce mot désigne un effort et une action pour transformer positivement le monde. Il ne s’agit pas seulement ni même principalement de l'application dans une vie individuelle d'un code de conduite, ou du respect personnel d'un certain nombre de règles morales*.

Dans plusieurs textes, Schweitzer esquisse une distinction entre deux grandes catégories d'attitudes religieuses qui génèrent deux comportements éthiques opposés dans leur principe, mais analogues dans leurs conséquences.

1. La première se montre sévère envers la réalité qui nous entoure, elle l’estime foncièrement mauvaise. Nous vivons dans le domaine du charnel, du matériel ou du diabolique. Le monde est un piège redoutable, destiné à prendre et à perdre l'être humain, en le rendant prisonnier de ses besoins et de ses désirs, en l'asservissant à ses ambitions et à ses soucis. Je me souviens, avoir appris par cœur au lycée, il y a plus de cinquante ans, un texte grec de Platon qui développait ce thème ; j’avais alors remarqué combien il rejoignait ce que disait le pasteur piétiste qui me faisait le catéchisme et qui dépeignait toujours la réalité en noir. Cette condamnation du monde conduit à préconiser l'évasion dans un au-delà ou un ailleurs. Les fidèles sont invités à se détourner du sensible, à renoncer à leurs activités, à se libérer de leurs liens mondains par l'ascèse pour s'adonner à la contemplation. Le salut consiste ici dans « l'émancipation du spirituel » . La rupture et le détachement s'obtiennent en libérant l'esprit des apparences et des chatoiements du monde.

Des attitudes de ce type dominent dans les sectes platoniciennes et gnostiques de l'Antiquité, dans le brahmanisme et le bouddhisme de l'Inde et dans certains courants du christianisme (la piété monastique ou le jansénisme, par exemple). Elles se caractérisent par une vision pessimiste ou négative du monde, qui dissocie totalement la vérité de la réalité : la vérité se trouve ailleurs que dans la réalité, la réalité ignore totalement une vérité qui lui est étrangère. Ces spiritualités n'accordent aucune place à l'éthique, au sens que Schweitzer donne à ce mot. Elles proposent à l'être humain non d'agir dans le monde, mais de le quitter. On a un système dualiste de négation non éthique du monde*. « Dualiste » parce qu’il sépare radicalement le domaine du divin et celui du monde ; « non éthique » parce que ce système n’incite pas à agir dans le monde pour le changer. Il pousse, au contraire, à s’en désintéresser et à s’en détourner.

2. Dans la seconde catégorie d’attitudes religieuses, Schweitzer range des courants à tendance moniste, qui identifient la vérité avec la réalité. Ils sont monistes parce qu’ils ne distinguent pas deux domaines, celui de Dieu et celui du monde. Les êtres, les choses, les événements dépendent entièrement de Dieu qui détermine tout ce qui existe et qui décide tout ce qui arrive. Le monde reflète, traduit, exprime la volonté divine, ce qui le rend bon et nécessaire. Il est comme il doit être, et ne peut être différent de ce qu'il est. Il n’y a pas contradiction mais coïncidence entre la vérité divine et la réalité du monde. Le croyant n'a pas à se préoccuper de la destinée de l'univers, ni à essayer de le changer. Il accepte l'ordre des choses, et se met en accord ou en harmonie avec la réalité. Ces attitudes religieuses se rencontrent surtout dans l'Islam, le stoïcisme, les religions de la Chine (Confucius et Lao-tseu). Elles développent une vision optimiste et positive du monde. Elles invitent leurs fidèles à comprendre, à se soumettre, à accepter et à consentir. On a un « système d'affirmation non éthique du monde ». Affirmation du monde, parce qu’on le valorise, on le déclare conforme à la volonté divine ; « non éthique » parce que le monde étant ce qu’il doit être, on n’envisage pas du tout de le transformer.

Dans les deux cas, on propose des systèmes dont la grande cohérence interne tue toute possibilité d'une véritable éthique. Les spiritualités de la négation et celles de l'affirmation du monde, bien que se fondant sur des évaluations contradictoires de la réalité, aboutissent au même résultat. Elles étouffent et suppriment l’éthique. Elles disqualifient et rendent insensé l’effort pour changer les choses.

Selon Schweitzer, l'évangile présente ici une véritable originalité. Il ne se laisse ranger dans aucune des deux grandes catégories. Jésus ne prêche pas le rejet du monde et la fuite dans un au-delà. Il ne demande pas, non plus, qu'on accepte la réalité telle qu'elle est, et qu'on s'y soumette. Il ne parle pas d'un Dieu qui serait ailleurs et en dehors d’elle, ni d'un Dieu qui la fonderait et la légitimerait. Il proclame que Dieu travaille à changer les choses. Dieu veut opérer une transformation ; il nous associe à cette tâche et nous mobilise pour elle . Selon une parole prophétique reprise par l'Apocalypse, il « rend toutes choses nouvelles ». « Le Dieu de Jésus, écrit Schweitzer*, agit et il agit dans l'homme ... il est volonté morale et vivante ». Cette conception du monde est à bien des égards moins logique et homogène que celle qui soutend les deux attitudes que nous avons décrites. Elle comporte des contradictions, et apparaît moins satisfaisante intellectuellement. Cependant, elle a l'immense mérite de susciter un engagement et un dynamisme. La supériorité de l'évangile vient de ce qu'il implique une affirmation éthique de la vie : affirmation puisqu’il en proclame la valeur ; éthique parce qu’il veut la transformer. Le commandement d’amour du prochain s’inscrit, aux yeux de Schweitzer dans cette conception de la vie qui lui donne son sens et sa portée.

5. Cohérence d'une pensée

Ma quatrième partie va essayer de montrer comment les analyses de Schweitzer se nouent entre elles et de dégager la cohérence de sa pensée.

1. Eschatologie et éthique.

Pour Schweitzer, le Dieu de l'évangile travaille à renouveler le monde. Il invite son fidèle ni à l'évasion ni à la soumission, mais à l'action. Ce dynamisme éthique constitue le sens profond de l'eschatologie néotestamentaire, une fois qu'on l'a débarrassée des fantasmagories apocalyptiques dans lesquelles on l'a primitivement pensée et exprimée et qui ne nous conviennent plus. Cette imagerie relève d'un autre univers culturel que le notre. Elle n'a pas de valeur en elle-même, en tant que représentation : elle n'a d'intérêt que par le message qu’elle a fait entendre, à savoir que le Dieu de Jésus, à la différence de celui des autres religions, est un puissance de transformation. Il faut annoncer, recevoir et concrétiser ce message en l'exprimant dans un langage adapté à notre époque. En ce sens, comme l’a souligné le bernois Martin Werner, Schweitzer anticipe le programme bultmannien de démythologisation. La vérité de l’évangile ne se situe pas dans la conceptualité et l’imaginaire, aujourd’hui périmés, qu’il utilise, mais dans les attitudes existentielles qu’il génère. Derrière ce qu’il dit à travers le langage et les représentations de son époque, il nous faut discerner ce qu’il veut vraiment dire, ce à quoi il nous appelle.

2. Évangile et respect de la vie

Pour Schweitzer, le principe du respect de la vie représente une traduction ou une transposition moderne de l'eschatologie du Nouveau Testament. Reprenons la classification que nous venons de voir. Les attitudes religieuses du premier type, celles qui font du monde l'empire du mal suscitent et cultivent un mépris de la vie. On la considère comme un malheur et une déchéance. Les attitudes religieuses de la seconde catégorie, pour qui le monde reflète la volonté de Dieu, conduisent à accepter, voire à sanctifier la mort, la souffrance, ainsi que toutes les puissances négatives qui œuvrent dans le monde.

Seul l'évangile, avec sa tension eschatologique, débouche sur un véritable respect et un authentique service de la vie. D'une part, il ne dédaigne pas ni ne rejette le monde, puisqu'il affirme que Dieu s'en occupe, travaille à son salut, veut le faire bouger. D'autre part, l'évangile ne nous pousse pas à sanctifier la part de mal et de mort que le monde porte en lui, puisqu'il nous annonce précisément que Dieu veut changer les choses et qu'il nous demande de nous battre contre les forces négatives pour les faire reculer, même si nous n'arriverons jamais à les vaincre et à les éliminer totalement. Ne pas s'évader dans un autre monde, ne pas accepter le monde tel qu'il est, mais travailler à le transformer, voilà en quoi consiste l'éthique du respect de la vie et voilà à quoi l'évangile nous appelle.

Schweitzer estime donc qu'il y a une spécificité et une supériorité de l'évangile qui tiennent à la nature de son message, plus précisément à cette eschatologie qui promeut une éthique. Toutefois, cette prééminence de l'évangile résulte d'une comparaison sujette à réexamen et à révision. Il ne s'agit pas d'un dogme indiscutable ni d'une conclusion définitive, mais d'un constat que de nouveaux éléments peuvent modifier. Il semblerait d'après les manuscrits qui restent, que son étude sur les penseurs de la Chine ait ébranlé chez Schweitzer sa conviction antérieure d'une spécificité et d’une supériorité de l'évangile. Il aurait trouvé des spiritualités ayant une insistance éthique comparable à celle de l’évangile, ce qui conduirait à les mettre sur le même plan, à leur accorder la même valeur et à renoncer à une prééminence de l’évangile. Il est difficile d'en dire plus, ces manuscrits étant inachevés, et pas encore complètement publiés.

3. Évangile et christianisme.

Si Schweitzer affirme la supériorité de l'évangile à cause de son élan éthique, par contre il ne proclame nullement celle du christianisme. Selon lui, le christianisme a déformé et défiguré l'évangile. Il a commis trois erreurs aux conséquences funestes.

1. Il a accordé une place démesurée aux dogmes. Il a développé quantité de spéculations. Ainsi, il a essayé de décrire l'être de Dieu, de définir son essence et sa personne dans une doctrine de la tri-unité, de déterminer où il se révèle et où il ne se révèle pas, qui est sauvé qui ne l'est pas, comment on est sauvé, etc. Il a élaboré une théorie des deux natures en Christ et de leurs relations. Il a fait de la croix un drame métaphysique entre le Père et le Fils. Il a engendré une dogmatique qui ne correspond pas à notre expérience de la réalité, et qui, l'étude des textes le montre, ne correspond pas au message du Nouveau Testament.

2. Il s'est tourné vers le passé, et a pris la forme d'une religion de l'anamnèse, du souvenir et de la commémoration, en oubliant l'annonce du Royaume qui devait le tourner vers l'avenir, l'orienter vers le royaume qui vient, et le mobiliser pour le nouveau monde à construire. Les Églises ont transformé la prédication eschatologique de Jésus en des célébrations archéologiques. Elles sanctifient les origines, les commencements. Elles ne cessent de rappeler Noël, le vendredi saint, Pâques, l’ascension. Elles oublient que la foi évangélique situe la vérité devant et non derrière nous, qu’elle annonce la venue d’un monde nouveau et ne préconise nullement l’imitation ou la répétition d’éléments anciens.

3. Troisième erreur du christianisme. Parce qu’il s’est trop occupé de dogmatique, il a négligé la mystique et l'éthique. D'une part, il n'a pas assez cultivé la vie intérieure, la méditation et la prière, ce qui l'a desséché et a fait de lui une construction formelle et artificielle, sans vie profonde. D'autre part, il a pactisé avec l'injustice; il a sanctifié les guerres, il a béni les puissants, ceux qui détenaient l'argent et le pouvoir. Du coup, il a déconsidéré l'évangile. Beaucoup de gens aujourd'hui ne veulent pas entendre parler de Jésus et de son message parce qu'ils le perçoivent à travers les Églises.

Pour Schweitzer, il s'agit, pour le christianisme, de revenir à la vérité existentielle et non dogmatique de l'évangile. Ce qu'est Dieu, une personne, une tri-unité, un élan vital, nous l'ignorons. La foi évangélique ne possède aucun savoir sur Dieu. Par contre, elle éprouve sa réalité « comme un torrent qui nous emporte ». Ce qu'a été vraiment Jésus, un prophète, un maître de sagesse, le messie ou le Dieu homme, nous n'en savons rien, et peu importe. Que le Christ inspire l'action des croyants, les mette en marche, les pousse en avant et les soutienne, voilà ce qui compte. L'évangile met en place une éthique, suscitée et animée par une mystique et non une métaphysique.

4. Le dialogue entre religions.

Pour Schweitzer, le dialogue entre religions sera fécond et fructueux à deux conditions.

D'abord, il exige que les religions acceptent ce qu'a découvert la modernité : la relativité et la limite du savoir humain. Qu'elles fassent le deuil de leurs prétentions absolues, qu’elles renoncent à tout expliquer. Elles doivent apprendre l'humilité et reconnaître leurs ignorances. À cette condition, elles deviendront tolérantes et ouvertes les unes aux autres.

Ensuite, ce dialogue ne sera véritable que s'il vise non pas des conversions, mais un enrichissement et une interpellation réciproques. Les religions ont à s'enseigner les unes les autres. Celles d'Orient apprennent aux occidentaux l'importance de la méditation, de la vie intérieure qu'ils ont tendance à négliger. De son côté, le christianisme doit sans cesse insister sur l'importance de l'éthique et rappeler que les disciplines spirituelles n'ont de valeur que si elles débouchent sur une action. Il faut mettre en place une écoute mutuelle qui permette aux uns et aux autres d'avancer, de s'approprier et de pratiquer le respect de la vie.

Conclusion

1 . La norme et l'évangile

Schweitzer soumet le monde des religions à une norme éthique. Cette norme ne lui sert pas à établir la supériorité de telle ou telle religion mais à leur proposer à toutes un effort, une réforme et un programme.

Ce critère éthique, Schweitzer la déduit directement de l'évangile. Toutefois, il estime qu’il a une valeur et une portée universelles. Autrement dit, le christianisme bien compris conduit à un principe qui le dépasse et le transcende. Ce qui implique que l'évangile n'est pas le but ultime, le sommet indépassable de la vie spirituelle, de la foi et de la pensée humaines. Il représente une voie particulière, même s'il s'agit d'une voie peut-être privilégiée, en tout cas supérieure à bien d'autres, pour atteindre ou recevoir une vérité qui ne lui est pas spécifique, qui ne lui appartient pas en propre, mais qui est commune à tous.

Schweitzer en est tellement convaincu qu'en affirmant le respect de la vie, il cherche à donner une formulation laïque, non religieuse du message qu'il a perçu dans l'évangile. On peut annoncer et recevoir ce message sans mentionner la personne de Jésus de Nazareth et sans se référer aux récits de la Bible. Car l'évangile ce n'est pas la personne de Jésus, mais le message qu'il a proclamé. Le christianisme est au service de ce message, il lui est subordonné. Ce qui compte, c'est le message, plus que la manière dont il nous parvient. Par contre, ce message n'a pas à promouvoir le christianisme, on ne peut pas l'utiliser de manière apologétique. Ce serait confondre et inverser la fin avec les moyens.

2. La norme et les religions.

À la lumière de la norme éthique, chaque religion découvre ses carences, ses insuffisances et ses échecs. Le christianisme occidental a développé un activisme incapable de déboucher sur une véritable éthique, faute d'avoir entretenu les sources mystiques qui seules peuvent l'alimenter, la rendre féconde. À l'inverse, l'Orient s'est absorbé dans le travail sur soi, et n'a pas su déboucher sur une action concrète pour changer le monde.

La norme éthique n'aboutit pas à un jugement qui donnerait tort aux uns et raison aux autres. Elle montre ce qui ne va pas des deux côtés, elle fait découvrir que chacun a besoin d'avancer, de progresser, de changer et que l'autre peut les y aider. En fin de compte, le dialogue devrait déboucher sur une dynamique. Si Dieu travaille à changer le monde, il travaille aussi à changer les religions.

André Gounelle

Notes :

Cf. Le secret historique de la vie de Jésus, 1901, traduction française chez Albin Michel, 1961. Son grand ouvrage De Reimarus à Wrede, 1906, n'a pas été traduit en français.

feuille

 

André Gounelle