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Première Partie
Réforme et protestantisme

 

Chapitre 2
Protestantisme, réforme et catholicisme

1. Protestant et protestantisme

1. Origine du mot “protestant”

On a parlé pour la première fois de “protestants” au cours d’une diète (c'est à dire d'une assemblée politique) qui se tint en 1529 à Spire (Speyer, à environ 120 km. au nord de Strasbourg). Trois ans aupara­vant, en 1526 éga­lement dans la ville de Spire, Charles Quint, ou plus exactement son frère Ferdinand de Habsbourg qui agissait en son nom, avait accordé, à titre provi­soire et plutôt à contre cœur, aux princes allemands qui le désiraient le droit d’opter pour la Réforme lu­thérienne (d'opter provisoirement, en attendant un concile qui trancherait les débats en cours). La situation politique plutôt mau­vaise de Charles Quint l'oblige à cette concession. En 1529, les affaires de l’Em­pereur vont mieux, il se sent plus fort. Il décide de faire preuve d'autorité en re­prenant en mains politi­quement et religieusement l'Allemagne. Il fait an­noncer, toujours par son frère, qu’il annule ce qu'il a dû autoriser trois ans auparavant et il or­donne que tout le monde se rallie à Rome. Cette décision se heurte au refus et à la protestation solennelle des princes et de représen­tants de villes favorables à Luther. Ils adoptent la déclaration sui­vante* :

Adhérer à cet édit "serait renier Notre Seigneur Jésus Christ et re­je­ter sa sainte parole ... C'est pourquoi nous refusons le joug qu'on nous impose. Nous protestons par les présentes devant Dieu, notre unique créateur, conservateur, rédemp­teur et sauveur, et qui un jour sera notre juge, ainsi que devant tous les hommes et toutes les créatures que nous ne consentons ni n'adhérons en aucune ma­nière pour nous et pour les nôtres au décret proposé dans toutes les choses qui sont contraires à Dieu, à sa sainte parole, à notre bonne conscience, au salut de nos âmes et au dernier décret de Spire".

On appela “protestants” les six princes et les quatorze repré­sentants de villes libres qui avaient signé ce texte, ainsi que leurs partisans. À partir de là, on a qualifié de “protestants” ceux qui se réclament des Réformes lu­thé­rienne, réformée, radicale (et souvent, mais avec plus d’hésitations, angli­cane).

2. Sens du mot "protestant.

A partir de ce rappel historique, trois remarques vont per­mettre de préciser le sens du mot "protestant".

1. Dans la langue du seizième siècle, le verbe “protester” n'a pas un sens négatif et ne désigne pas d’abord une attitude d’opposi­tion et de refus. Il si­gnifie "attester", "proclamer", "affirmer publique­ment" (comme dans l’ex­pression "protester de sa bonne foi"). Néanmoins, on doit souligner que les princes af­firment leur refus d'obéir à l'Empereur. Ils proclament leur contestation et leur rejet d’un décret impérial. Leur texte constitue, donc, une protestation aussi bien au sens positif du mot au seizième siècle qu’au sens né­gatif qu’il a pris aujourd’hui.

2. La déclaration de 1529 fait intervenir plu­sieurs registres à la fois, ce qui lui donne un grand intérêt. Elle comporte quatre di­mensions, la reli­gieuse, l'éthique, la politique et la laïque, qui joue­ront par la suite un rôle im­portant dans l’identité pro­testante.

- D'abord, la dimension religieuse. La protestation de Spire se réfère à Dieu, à sa parole et elle se préoccupe du salut. Le protestan­tisme est, avant tout, une certaine manière de comprendre la foi chrétienne et il a une réalité es­sentiellement religieuse.

- La protestation de Spire a également une dimension éthique; elle parle de ne rien faire contre sa conscience. Le protestantisme a toujours eu le souci d'une conduite moralement juste, bien fondée, et il a toujours eu tendance à refuser de transiger avec les principes.

- Ensuite, cette protestation revêt un caractère politique évident. Elle s’oppose à un acte de l’Empereur qui ré­voque un com­promis accepté antérieurement. Elle affirme implici­tement les limites de l’autorité du sou­ve­rain. Par là, elle contient en germe le principe de la liberté de conscience, même si les signataires ne le voient pas (puisqu’ils imposent à leurs sujets de suivre leur choix).

- Enfin, cette protestation ne vient pas de théologiens ou d’ec­clésias­tiques, mais de princes ou d'édiles qui sont des séculiers ou des laïcs. Dans le protestantisme, les laïcs exercent de grandes res­ponsabilités et occupent des fonctions d'autorité dans la direction des Églises. 

3. Les partisans de la Réforme ne se sont pas ap­pelés eux-mêmes "protes­tants". Ce sont les autres, leurs adversaires qui les ont ainsi nommés. Ce terme, ils ne l'ont pas choisi; il leur a été appliqué du dehors, de l'extérieur. Néanmoins, ils l'ont très vite adopté. Au delà des circonstances historiques qui expliquent origi­nellement son emploi, cette appellation s'est répandue et a persisté, parce qu'elle a eu une résonance profonde chez eux et qu'ils se sont reconnus en elle. Les protestants se définissent volontiers par deux protesta­tions.

- La première est une protestation pour Dieu contre ce qui le défigure et le masque. Ainsi, quand Luther s'en prend aux indul­gences, il dénonce l'image d'un Dieu qui marchande, juge, punit, qui se définit par la loi et non par la grâce. Quand les princes résistent à Spire au décret de Charles Quint, ils affirment la souveraineté de Dieu contre ceux qui prétendent exer­cer le pou­voir en son nom. Le protestantisme se veut combat contre l'idolâ­trie, c'est-à-dire contre toute confusion de Dieu avec une réalité du monde. Dieu se trouve au-delà et diffère même de ce qui l'exprime ou le manifeste. On pourrait dire qu'il s'agit ici d'une protestation pour l'honneur ou pour la gloire de Dieu.

- La seconde est une protestation pour l'être humain, contre ce qui l'écrase et l'asservit. Les indulgences font partie d'un système qui opprime l'être humain en le faisant vivre dans la peur. Dans la déclaration des princes à Spire, il y a, au moins en germe, l'affirma­tion de la responsabilité de l'être humain devant Dieu, qui conduit à celle de sa dignité et de la liberté de conscience. Les principes du protestan­tisme l'amènent à plus insister sur la personne que sur la commu­nauté, sur l'individu que sur le groupe*, ce qui a d'importantes conséquences sociales, politiques, dont la plupart n'ap­paraîtront que petit à petit et ne deviendront conscientes qu'à partir du dix-hui­tième siècle.

3. Réforme et protestantisme

Si on parle très tôt de “protestants”, par contre le terme “protestantisme” apparaît dans la langue française seulement cent ans plus tard, au dix-septième siècle, autour des an­nées 1620. Il ne devient courant que vers 1690 pour désigner les Églises et mouve­ments issus des Réformes luthé­riennes, réfor­mées et radicales*. Ce décalage ne relève pas seulement du ha­sard, ou des évolutions du langage. Il a valeur de signal et d’avertis­sement. Il indique qu’il ne faut pas trop vite assimiler ni identifier, comme on a ten­dance à le faire, le protestantisme avec la Réforme. Même s'il y a des liens étroits qui empêchent de les dissocier, protestantisme et réforme ne se confondent pas purement et simplement. Comment définir leurs relations? A cette question, les spécialistes ont apporté quatre ré­ponses différentes, qui comportent cha­cune une part de vérité.

1. La première, défendue par exemple par J. Courvoisier et B. Cottret*, consi­dère que le protestantisme naît quand les partisans de la Réforme renon­cent à leur projet initial de rallier à leur mouvement l’ensemble des chrétiens. Prenant acte de leur échec à réformer toute l'Église, ils se résignent à former des communautés séparées et à établir un protestantisme à côté et en face du catholicisme. Ce consentement, faute de mieux, à la séparation se fait pro­gressive­ment. Selon les pays et les personnes, il intervient à des mo­ments dif­férents du seizième siècle. Le protestantisme naît de l'échec partiel de la Réforme. On peut parler de protestantisme à partir du mo­ment où la rupture s'institutionnalise et où se consti­tuent des Églises distinctes qui entendent suivre les principes de la Réforme.

2. La deuxième réponse estime que le protestantisme apparaît quand les Églises luthériennes, réformées, radicales et anglicanes se découvrent en­semble, solidaires, du même côté de la barrière face au catholicisme considéré comme leur adversaire com­mun. Au dé­part, les divergences entre luthériens, réformés et radicaux appa­raissent aussi vives et profondes que celles qui les oppo­sent à Rome. Luthériens, réformés et anglicans condam­nent et combat­tent plus fortement l’anabaptisme que le catholicisme. La question de la Cène fait que les luthériens s’estiment parfois plus proches des catho­liques que des réformés. À partir de la seconde moitié du dix-sep­tième siècle, les choses changent, notamment à la suite de la Révocation de l’édit de Nantes qui a indi­gné l'Europe non catholique et qui a créé entre les chrétiens non romains un fort sentiment de solidarité. Au dix-neuvième siècle, les tracas­series des États envers des groupes de type radical (ou des mouvements de Réveil, parfois proche des thèmes de la Réforme radicale) poussent, par réaction, à des rap­proche­ments et à des alliances. Ces événements créent la conscience d’une parenté suffisante pour justifier l’étiquette com­mune de “protestantisme”. Cette thèse a été en parti­culier avancée dans plusieurs des colloques qui se sont tenus en 1985 pour le troi­sième centenaire de la Révocation de l'édit de Nantes. On voit donc ici dans le protestantisme l'alliance, ou le front uni des communautés chrétiennes dissidentes contre l'Église dominante.

3. Le théologien et historien allemand Ernst Troeltsch a pro­posé une troisième réponse*. Selon lui, dans l’histoire du christia­nisme occidental, la véritable coupure se situe au dix-huitième siècle. Les positions luthériennes et réformées des seizième et dix-septième siècles ressemblent plus à celles du christianisme du Moyen Âge qu’à celles du protestantisme actuel (que Troeltsch nomme “néo-protestantisme”)*. Deux facteurs amènent ce change­ment ou cette rupture : d'abord, l’apparition de la critique historique et lit­té­raire de la Bible, qui entraîne une nouvelle relation avec le texte des Écritures; ensuite, la séparation du religieux et du poli­tique, de l'Église et de l'État, et le développement d'une société sécu­larisée. Ces deux facteurs ont considérablement modifié le contexte social, religieux et intellectuel. Ils ont fait surgir des problèmes au­paravant ignorés, auxquels il a bien fallu trou­ver des solutions. Ils ont engendré des manières de penser, de croire et de vivre très diffé­rentes. Ils ont conduit les Églises issues de la Réforme à se donner un visage autre que celui qu’elles avaient à l’origine. Autrement dit, ils ont fait passer de la Réforme au protestantisme

Cette troisième réponse a le mérite de souligner que le protes­tantisme ne se définit pas tant par le maintien ou la répétition pure et simple des prin­cipes de la Réforme que par leur interprétation et leur adaptation à des situa­tions différentes. Les textes fondateurs du seizième siècle ne suffisent pas à le caractériser. Il faut encore dé­terminer comment il les comprend, se les ap­proprie, ce qu’il en conserve, ce qu’il en modifie et ce qu’il en abandonne. Le protestan­tisme est donc une "herméneutique" de la Réforme, qui en propose une version et une application en fonction de divers contextes, entre autres ceux du monde moderne et contemporain.

4. A la différence des celles que l'on vient de voir, une qua­trième ré­ponse, que l'on trouve chez le français Wilfred Monod et le ger­mano-américain Paul Tillich*, estime que le protestantisme ne suit pas la Réforme. Il ne vient pas après, il l'a précédée. Il y a toujours eu dans l'Église, depuis les origines, dès l'Antiquité et durant tout le Moyen Age, des tendances et des cou­rants de type protestant. Au seizième siècle, les tensions ont été telles qu'elles ont rendu inévitables l'éclatement du christianisme et le schisme. Si le protestantisme a pris seulement alors la forme d'Églises séparées et dis­tinctes, en fait il existe à l'intérieur de la chrétienté bien avant la Réforme. Il hérite de l'Église du Moyen Age tout autant que le ca­tholicisme classique, mais il ne privilégie pas dans cet héritage les mêmes éléments. Quantité de personnages et de mouvement anté­rieurs au seizième siècle re­présentent et défendent des positions très voi­sines de celles de la Réforme. On qualifie souvent, par exemple, de pré-réfor­mateurs des gens comme le tchèque Jean Hus, l'anglais John Wyclif au qua­torzième siècle, l'italien Jérome Savonarole au quinzième siècle. Longtemps, on s'est interrogé sur une possible parenté, voire une filiation entre les ca­thares et les protestants; aujourd'hui où l'on connaît mieux le mouve­ment cathare, on estime en général peu probable qu'il y en ait une. Par contre, on trouve un exemple indiscutable de protestantisme avant la Réforme avec le lyonnais Pierre Valdo, au douzième siècle, dont des partisans, réfugiés en Provence, dans le Lubéron, et dans les Alpes italiennes, subsistent jusqu'au seizième siècle. En septembre 1532, au synode de Chanforan (vallée d'An­grogne), ils se rallient à la Réforme réfor­mée, à la suite de contacts avec Guillaume Farel. La Réforme serait donc ici une incarnation particulière et exemplaire d'un protestan­tisme qui le dépasse et qui a auparavant existé sous diverses formes.

Ces quatre réponses ne se contredi­sent pas ni ne s'excluent. Elles mon­trent que le protestantisme est un phénomène complexe, qui a de multiples aspects et qui naît de la convergence de plusieurs éléments, institutionnels, po­lémiques, historiques, théologiques. Chacune des réponses privilégie l'un de ces éléments. Il faut tous les prendre en compte, et définir le protestantisme comme une attitude théologique, reli­gieuse et spirituelle qui a précédé le sei­zième siècle, qui se concrétise et se précise dans les réformes magistérielles et radicales, qui ensuite s'institu­tionnalise et s'adapte à des situations nouvelles.

2. Le protestantisme et les protestantismes

1. La pluralité protestante.

Dans un livre de controverse intitulé L'histoire des variations des Églises réformées, et publié en 1688, Bossuet oppose la diversité du protes­tan­tisme, signe à ses yeux d'erreur, à l'unité catholique, gage de vérité. D'un côté, argumente-t-il, on a un vaste éventail de positions différentes, parfois contradictoires, de l'autre une grande uniformité, un large et solide accord. On peut discuter de ce constat et des conclusions qu'en tire Bossuet. Ainsi, au dix-neuvième siècle, Newman, contrairement à Bossuet, situe la supériorité du catholi­cisme dans sa faculté de se transfor­mer, et nullement dans une permanence sans modifications. On affirme parfois que la di­ver­sité et les évolutions ne se trouvent pas seulement du côté des protestants*. On les rencontre aussi dans le catholicisme et elles ne constituent pas forcément une faiblesse. Il n'en de­meure pas moins vrai que chez les protestants, depuis le dix-septième siècle, la plu­ralité n'a fait que se confirmer, voire s'amplifier, alors que, malgré des ten­sions internes parfois vives, le catholicisme a maintenu et maintient une ho­mogénéité au moins apparente. Le protestantisme apparaît à l'observa­teur comme tellement hétéroclite qu'il se demande parfois si tous ceux qu'on ap­pelle protestants ont un seul point en commun, s'il existe entre eux une quel­conque unité.

On range en général sous l’étiquette “protestantisme” une trentaine de dénominations diffé­rentes. Elles peuvent se classer dans quelques grandes familles : la luthérienne, la réformée, l’anglicane, la bap­tiste, la pentecôtiste, l’unitarienne. A l’intérieur de chaque famille, on trouve des courants à dominante orthodoxe (très attachés à la doctrine tradition­nelle et aux formules du seizième siècle), bibliciste (privilégiant la référence aux Écritures, lues de manière non critique), libé­rale (soucieux d’une reli­gion éclairée, raisonnable, en dialogue avec la cul­ture), enthou­siaste ou ins­pirée (insistant sur l’action de l’Esprit), piétiste (cultivant une religiosité souvent sentimentale), etc. Les Églises protestantes s’organisent selon des systèmes di­vers : épiscopalien (où des évêques ont l’autorité), congrégatio­naliste (où chaque pa­roisse locale est indépendante), presbytérien-synodal (où les déci­sions sont prises par des conseils locaux et des assemblées régio­nales et natio­nales). Certains, les luthériens, ont conservé le crucifix, d'autres, les réformés le rejettent catégoriquement (ils n'ont même introduit massivement des croix nues dans leurs sanctuaires qu'au début de notre siècle, tellement ils avaient peur des "images taillées"). Dans cer­taines Églises protestantes du Nord de l'Europe, on célèbre des céré­monies impo­santes, solennelles et chamarrées, qui semblent n'avoir pas bougé depuis des siècles; ailleurs, au contraire, la simplicité et le dépouillement vont à l'extrême. Chez certains, le culte est minutieu­sement réglé, chez d'autres, il laisse place à une très grande sponta­néité. Quand on passe d'un office des noirs américains du sud, à celui du temple réformé de l'Oratoire à Paris, on a l'impression de deux mondes différents et on a de la peine à croire que les uns et les autres sont des réformés. Il existe, cependant, un point commun, qui n'est pas mineur : l'importance donnée à la prédication; c'est elle, et non pas l'eucharistie, qui constitue le centre ou le cœur du culte. Il y a là un des signes distinctifs du protestantisme qui se retrouve à peu près partout. A côté de cela, on a des spiritualités, des théologies, des rituels, des or­ga­nisations très dissemblables. 

Il y a de quoi se perdre dans ce foisonnement. De plus, on ren­contre quantité de sectes et de mouvements dont on ne sait trop si on doit ou non les considérer comme faisant partie du protestan­tisme (ainsi, les témoins de Jéhovah). Il apparaît difficile d’en tra­cer net­tement les limites. Toutefois, on ne doit pas exagérer cette diversité. Beaucoup de différences portent sur des points (par exemple l’organisation de l'Église) que les protes­tants ju­gent secondaires, alors qu’ils s’estiment d’accord sur l’essentiel. Il faut donc essayer de discerner les éléments ou les structures qui permettent de parler, en dépit de ces variations, de "protestan­tisme".

2. Principes, doctrines et dogmes.

Pour bien comprendre comment se conjugue une diversité qui appelle le pluriel ("les protestantismes") avec une unité qui autorise le singulier ("le protestantisme"), il paraît utile de distinguer entre dogmes, doc­trines et prin­cipes.

1. Par dogme le catholicisme entend "une proposition qui ex­prime une partie du contenu de la révélation divine et qui est publi­quement proposées comme telle par l'Église"*. Il s'agit donc d'une vérité révélée que l'Église reconnaît et promulgue comme telle. Par principe, les dogmes sont intangibles et irréfor­mables. Ils définissent ce qu'il faut croire en tout temps et en tous lieux, pour reprendre une formule de Vincent de Lérins. Ils détermi­nent le sens à donner aux textes bibliques. Le protestantisme, à la dif­férence du catholicisme, n'a pas de dogmes ainsi définis*. En re­connaître reviendrait, à ses yeux, à accorder à l'Église une autorité qui appartient à la seule Écriture. On le voit très bien dans la posi­tion qu'adopte Calvin au cours d'une controverse qui se déroule durant les années 1537-1545. Certains soupçon­nent à tort le Réformateur, voire l'ac­cusent de rejeter le dogme trinitaire. Ils som­ment le Réformateur, pour démontrer son or­thodoxie sur ce point, de signer les symboles d'Athanase et de Nicée-Constantinople. Calvin refuse; non pas parce qu'il serait en désaccord avec ces symboles, il en approuve le contenu, il souscrit à ce qu'ils disent, mais parce qu'il ne veut pas donner à une défi­nition ecclésiastique, si juste lui semble-t-elle, l'assentiment et la soumission que seule la Bible a le droit de ré­clamer. Il ne faut pas, écrit-il, "introduire dans l'Église cet exemple de tyrannie : que soit tenu pour héré­tique qui­conque n'aurait pas répété les formules établies par un autre"*. Vingt ans plus tard, dans la même ligne, Théodore de Bèze, publie un petit livre intitulé La confession de foi du chrétien, qui présente les enseigne­ments des Églises réformées. Dans la préface, il se défend de vouloir "pres­crire à qui que ce soit un formulaire de confession de foi" et demande que l'on compare, que l'on confronte son texte avec l'Écriture "seule pierre de touche"*.

2. Si les Églises protestantes n'ont pas de dogmes, au sens que l'on vient de dire, par contre, elles ont des doctrines, c'est-à-dire des enseigne­ments, sou­vent consignés dans ce qu'on appelle des "confessions de foi" ou des "écrits symboliques". Les doctrines formu­lent l'enseignement que l'on tire de la Bible; elles indiquent la manière dont on comprend son mes­sage et les consé­quences que l'on en déduit. Elles expriment sur le mode intel­lectuel ce que vit la foi. Les doctrines se distinguent des dogmes en ce qu'elles n'ont jamais une valeur absolue. Ce sont des interprétations qui dépendent en partie du contexte cul­turel, des conditions historiques, etc. Elles ont valeur de proposition plutôt que d'obligation. On peut toujours les criti­quer et les réviser en fonction et à partir de "principes". Ainsi les confes­sions de foi ré­formées, à la différence des décisions des Conciles ne se pré­tendent pas dé­finitives et irrévocables. Elles comportent en général une clause qui indique qu'on peut les améliorer ou les corriger*.

3. La notion de principe joue un rôle essentiel. On peut parler, en effet, à juste titre de protestantisme pour tous les groupes qui se réclament (même s’ils les ré-interprètent) des deux principes remis en valeur, posés comme décisifs et fondamentaux par les Réformes magistérielles et radicales du sei­zième siècle : le principe dit "for­mel" de l'autorité souveraine de l'Écriture en ma­tière de foi, le prin­cipe dit "matériel" de la justification par grâce ou du salut gratuit. On dit principe matériel parce qu'il in­dique le "contenu" (comme le fait une "table des matières"); la justification par grâce est la "matière" es­sentielle de l'enseignement biblique. On dit "principe formel" parce que la Bible est la "forme" qu'a prise l'annonce de la justification  par grâce.

Quelle différence entre un dogme et un principe? Alors que le dogme se présente comme une défini­tion qu'il faut accepter, le principe indique une orientation à suivre, ou une tâche à entre­prendre. On pourrait comparer le dogme à un édifice achevé où il faut entrer et habiter sans rien y changer et le principe à une route sur laquelle on marche. Au caractère plutôt sta­tique du dogme, s'op­pose la dy­namique du principe.

Dans cette perspective, l'unité du protestantisme se situe au niveau des principes, et sa diver­sité à celui des doctrines. Lesquelles traduisent le mieux, et lesquelles tra­hissent les deux principes fon­damentaux? Sur cette question, les protes­tants discutent et se divi­sent, mais ce débat implique leur accord sur les deux principes es­sentiels. Deux exemples illustreront ce  point :

1. Les fondamentalistes veulent rendre compte du principe de l'au­torité des Écritures par la doctrine de l'inerrance, qui déclare que la Bible ne contient aucune erreur d'aucune sorte, que tout ce qu'elle dit est vraie dans tous les domaines. Cette doctrine est contestée par les réformés et lu­thériens qui admettent qu'il existe des erreurs (par exemple historiques, géogra­phiques ou scienti­fiques) dans la Bible, et qui disent que la Bible a autorité en matière de foi, mais pas en d'autres matières. Le même principe se traduit, ou s'exprime dans des doctrines différentes.

2. Les calvinistes ont voulu rendre compte du principe de la jus­tifica­tion par la doctrine de la double prédestination selon laquelle Dieu décide de sau­ver quelques-uns et de perdre les autres de ma­nière totalement arbi­traire, sans autre raison que son bon vouloir. Mais, de nombreux ré­formés refusent la double prédestination tout en proclamant la justifi­cation par grâce. Le désac­cord ne se situe pas au niveau des principes, mais à celui des doctrines.

3. L’attitude protestante

L'unité protestante, au delà de ses diversités, consiste égale­ment en une attitude religieuse et spirituelle. Dans l’histoire du christianisme, depuis les origines, on constate une tension constante, qui se traduit souvent par des af­frontements, entre deux ten­dances.

1. La première met l’accent sur la réalité de la présence de Dieu en cer­tains lieux. “Lieu” doit se comprendre au sens large : des endroits (sanctuaires, pèlerinages), mais aussi des institutions (l'Église, la papauté, l’ensemble des évêques, les conciles ou sy­nodes), des textes (la Bible, les dé­finitions doctrinales et confessions de foi ecclésiastiques), des cérémonies (rites, sacrements), des objets (reliques), voire des images (icônes). La na­ture et la liste de ces lieux du religieux varient selon les cas. Dans ceux que l’on re­connaît, on estime que le croyant rencontre l’être même de Dieu. On croit que là, les êtres humains se trouvent en présence de la divinité et en contact presque physique avec elle. On affirme que Dieu se lie à des places, à des mo­ments et à des choses; à travers eux, il prend pour nous un visage concret, il s’ap­proche de nous, nous atteint et nous visite. On pourrait presque dire qu’il s’y incarne. On leur accorde, donc, une importance énorme. On les tient pour sa­crés. Les perdre revient à se couper de Dieu, à priver la foi de sa réalité. Les profaner signifie attenter à l’être même de Dieu. On veut à tout prix les main­tenir, les préserver, les protéger. Ils fondent et structurent la religion (au sens de relation avec Dieu), qui sans eux n’aurait plus rien à offrir, et se vide­rait de tout contenu. On peut qualifier cette première tendance de sa­cramen­telle et de sacerdotale; le sacrement a pour fonction d’assurer la pré­sence de Dieu, et le sacerdoce de mettre en communication avec lui.

2. La seconde tendance a, au contraire, un caractère iconoclaste. Au sens propre, l’iconoclasme consiste à casser les icônes, à briser les statues ou à déchirer les images sacrées. Par extension, ce terme s’applique à ceux qui re­jettent toute figuration et refusent toute lo­calisation de Dieu. L’iconoclasme s’en prend non seulement aux re­présentations picturales du sacré, mais aussi au ritualisme, au sa­cramentalisme, au dogmatisme, à l’ec­clésiocentrisme, au biblicisme, non par incrédulité ou incroyance, mais parce qu’il redoute, non sans raisons, qu’on divinise les rites, les sacrements, l'Église, la Bible, les dogmes et qu’on en fasse des idoles. Il juge sacrilège et blasphéma­toire la sa­cralisation de certains lieux, parce que Dieu seul est divin; il a le monopole du sacré ou du saint. Rien ne peut le lier ni “l’enclore”, comme l’écrit Calvin. Dieu reste toujours souverainement libre. Sa présence n’est pas matérielle, c’est-à-dire liée à des choses qui la contiendraient ou la pro­voqueraient. Elle est spirituelle, elle relève d'un acte ou d'un événement dû à l’Esprit, et non d'une institution. Dieu ne réside nulle part. Il vient à nous quand et comme il le veut. On peut qualifier de “prophétique” cette seconde tendance parce que dans l’Ancien Testament, les prophètes ont résisté à la confiscation du divin par les prêtres, et à son enfermement dans les céré­monies cultuelles. Ils dé­fendent le libre jaillissement de l’Esprit divin hors des lieux et des usages consacrés. Comme l'écrit C. Wagner, "l'esprit clérical confisque Dieu, le capte et déclare qu'il le représente et le possède... Le prophète, lui, déclare : Dieu n'habite pas les temples bâtis de main d'homme. Dans cette déclaration sont frappés d'insuffisance et de caducité non seulement les sanctuaires de pierre..., mais encore les sanctuaires bâtis en formules intellectuelle, dogmes, textes et symboles"*.

D’un côté, on insiste sur la présence substantielle de Dieu en certains endroits, tandis que, de l’autre, on affirme que Dieu se trouve au delà de tout ce que nous pouvons toucher, imaginer et penser. Il se situe en dehors et au des­sus de cela même qui mani­feste sa présence.

Ces deux tendances se ren­contrent à l'intérieur de chacune des Églises chrétiennes. La première correspond, cependant, à une atti­tude de type plutôt ca­tholique, la seconde à une attitude de type plutôt protestant. Il ne faut pas simplifier à l'excès des attitudes et des frontières extrêmement complexes. On constate des décalages qui brouillent les idées, et compliquent les définitions. Des chrétiens qui appartiennent ou se rattachent à des Églises protestantes se montrent parfois plus sacralisants que protestataires. Ceux qui ap­partiennent officiellement au protestantisme ont toujours besoin d’être “protestantisés” (une formule* souvent citée déclare : “nous sommes réformés parce que nous devons toujours nous reformer”, Ecclesia reformata quia semper reformanda). On trouve, à l'inverse, des chrétiens qui se rattachent à d'autres Églises, qui  ne portent pas l'étiquette de "protestants", voire qui la refusent, et qui pour­tant sont plus protestataires que sacralisants*. Les protestants ne dé­tiennent pas le monopole de l’attitude protestante, de même que l'attitude catholique n'est pas l’exclusivité de ceux qui appartiennent à l'Église de Rome.

Il n’en demeure pas moins que la tendance sacramentelle et sacerdotale a pris son expression historique la plus achevée dans le catholicisme et que l’attitude prophétique et iconoclaste a trouvé ses formes les plus caractéris­tiques dans le protestantisme. Ce qui jus­tifie qu'on puisse qualifier, avec les nuances et précautions que l'on vient d'apporter, la première de catholique, la seconde de protes­tante.

L'unité du protestantisme, dans cette perspective, réside dans cette atti­tude qui refuse de diviniser ou de sacraliser quoi que ce soit d'humain ou de mondain, et qui considère que le Créateur est toujours différent de ce qui se trouve dans la création. Sa pluralité vient de ce que cette attitude commune et essentielle s'applique différemment selon les cas.

3. Protestantisme et catholicisme

1. Le schisme d'occident et le schisme d'Orient.

Inévitablement le protes­tantisme doit se situer par rapport au catholi­cisme et se définir en fonction de lui. On ne voit pas comment il pourrait faire autrement, même si cette présentation, ce que beau­coup regrettent*, lui donne parfois une allure agressive et négative. Si le protestantisme a l'ambi­tion d'être un catholi­cisme réformé, corrigé, et révisé, il lui faut bien dire ce qu'il veut redresser ou rec­tifier. S'il conteste l'identification entre Dieu et certaines formes du sacré, il doit les désigner et en proposer une compré­hension qui lui paraît plus juste. Il ne peut nier ou ignorer cette dépendance à l'égard de ce dont il s'est détaché.

Théologiquement et historiquement, là réside une des grandes diffé­rences entre le schisme d'Orient (qui sépare les orthodoxes grecs et russes des catholiques romains), et le schisme d'Occident (que provoque les Réformes du seizième siècle).

On date, en général, la rupture entre Églises latines et grecques du 6 juillet 1054, jour où le légat du pape Léon IX, le cardinal Humbert, dépose sur l'autel de l'église Sainte Sophie à Constantinople l'acte d'excommunica­tion du patriarche Michel Cérulaire. Bien que spectaculaire, ce geste et la séparation qu'il si­gnifie ont eu peu de répercussions dans les paroisses grecques et la­tines. En 1054, les représentants de Rome et de Constantinople ne s'étaient pas rencontrés et n'avaient pas dialogué depuis presque deux siècles. La diffé­rence de langues (les lettrés deviennent rares) et la difficulté des voyages (due essentiellement à l'insécurité des routes terrestres et maritimes) inter­rompent pratiquement les rela­tions et communications entre les pays la­tins et les régions grecques. Les deux parties de la chrétienté vivent et se dé­veloppent indépendamment l'une de l'autre, en s'ignorant mutuellement. Quand elles reprennent contact, elles s'aperçoivent qu'elles ne pen­sent pas, ne prient pas, n'agissent pas de la même manière. Elles ont pris des voies dif­férentes. Le schisme en tire les conséquences. Il se produit au niveau des diri­geants ecclésiastiques et n'affecte guère la vie concrète des Églises. La plu­part des fidèles n'en enten­dent même pas parler.

Au contraire, en Occident, les partisans et adversaires de la Réforme se trouvent continuellement en débat. La discussion entre eux dure depuis plus de quatre siècles et demi. Ils se rencontrent, se côtoient et se connais­sent bien. Leurs relations, âpres conflits d'au­trefois ou désaccords amicaux d'aujour­d'hui, font partie de leur identité propre. L'orthodoxie peut se pré­senter sans se référer au catholicisme, parce qu'elle naît et se déve­loppe indépendamment de lui. Au contraire, le protestantisme est inintel­ligible sans le catholi­cisme. De son côté, le catholicisme classique (issu du Concile de Trente) ne peut pas se comprendre sans la Réforme; il en va de même du catholicisme d'après le se­cond Concile de Vatican. Il n'existe pas, écrit justement Tillich, de "vision protestante isolée...il n'y a pas deux réalités, d'un côté le catholicisme, et de l'autre le protestantisme"*. La dureté des affrontements du passé s'explique en partie par la proximité (les querelles de familles sont les plus terribles). La présence et les critiques de chaque confession stimu­lent, depuis le seizième siècle, la réflexion théologique et les pra­tiques ecclésiastiques de l'autre. Leurs liens empêchent de les isoler; ils rendent impossible de s'épargner comparaisons et confrontations.

2. Qu'est ce qui sépare catholicisme et protestantisme?

À cette question, on a donné trois réponses différentes :

1. La première insiste sur les doc­trines. Elle déclare que catho­liques et pro­tes­tants se sépa­rent parce qu'ils sont en conflits sur un certain nombre de points qu'ils ne comprennent pas de la même ma­nière. Dans une formule simpliste et frappante, Laurent Gagnebin a écrit qu'ils se querellent princi­pa­lement à cause d'un homme (le pape), d'une femme (la Vierge Marie) et d'une chose (la Cène ou eu­charistie)*. On peut dres­ser une liste plus nuancée et plus longue des thèmes sur les­quels ils divergent. On dénombre et on dé­limite ainsi des su­jets de désaccord.

2. À notre question, un très grand théolo­gien protestant du dé­but du dix-neuvième siècle, l'alle­mand Frédéric Schleiermacher* es­quisse une seconde réponse. Catholicisme et protestantisme, dit-il, ne se diffé­rencient pas princi­palement par une série de divergences sur des points précis, sur des doctrines particulières (dans chaque confession, il existe d'ailleurs un éventail assez vaste d'opinions et d'orientations doctrinales). Ils se séparent es­sentiellement par la manière dont ils articulent et relient entre eux les grands thèmes de la foi chrétienne. Par exemple, l'Église joue un rôle important aussi bien dans le protestantisme que dans le catholicisme, mais les deux confessions ne lui at­tribuent pas la même fonction dans la vie chré­tienne. Pour le catholi­cisme, l'Église se trouve entre le Christ et le croyant. C'est par son moyen, par sa mé­diation, c'est à dire grâce à son rôle d'intermédiaire que le Christ rencontre les fidèles. Au contraire, selon le protestantisme, le Christ entre en contact avec le croyant par sa parole et son Esprit. Et le Christ envoie ceux qu'il a tou­chés dans l'Église. L'Église découle de notre lien avec le Christ. Elle n'est pas la mère de la foi, elle en est la fille. C'est parce que j'ai ren­contré dans mon existence le Christ que j'entre dans l'Église. Des deux côtés, on a les mêmes réalités, le Christ, le croyant, l'Église, mais on les organise autre­ment*. L'eucharistie ou de la Cène fournit un autre exemple, peut-être plus actuel, de structuration diffé­rente. Selon une for­mule sou­vent répétée, le catholicisme voit dans l'eu­charistie "la source et le sommet" de la vie chrétienne. Le protestan­tisme, sur­tout dans sa version réformée, voit plutôt dans la Cène un instru­ment, un outil, un "moyen" : non pas la source ni le sommet, mais ce qui tient entre les deux. Elle a un rôle pédagogique et une place d'auxiliaire. D'un côté comme de l'autre, se trouvent les mêmes éléments, mais on les articule diffé­remment.

3. La troisième réponse, développée par P. Tillich, estime que catholi­cisme et protestantisme se distinguent surtout par des atti­tudes différentes, sa­cralisante d'une part, protestataire d'autre part. Nous les avons définies l'une et l'autre dans le paragraphe qui ter­mine la partie précédente de ce chapitre.

Pour Tillich, chacune des deux attitudes a besoin de l'autre. D'une part, si elle n’a plus le sentiment de la présence divine dans des lieux et des mo­ments précis, si elle écarte l’immanence divine et rejette l‘incarnation, si elle ne fait plus d’expérience sacramentelle, la foi finira par s’évanouir et s’éva­porer. D’autre part, si elle oublie la liberté, la souveraineté, l’altérité et la transcendance de Dieu, si elle ne voit pas qu’il dépasse toutes les formes re­ligieuses, alors la foi bascule dans la magie, et l’idolâtrie. La sacralisation tombe dans la su­perstition sans la protestation qui souligne l'altérité de Dieu. L'attitude protestataire conduit à une foi vide de contenu, si le sens de la présence divine ne la corrige pas. Le croyant a be­soin à la fois d’une at­testation religieuse de Dieu, et d’une pro­testation qui marque la distance entre Dieu et la religion. Quand l’une ou l’autre manque, on court au désastre.

Il en résulte que le conflit, ou plus exactement la tension entre deux pôles opposés est indispen­sable pour la vie de la foi. Il ne faut pas y voir un mal. Si cette opposition disparaissait, ce serait une catastrophe. Il y a donc entre catholi­cisme et protestantisme une nécessaire complémentarité conflic­tuelle. Il ne faut pas éliminer leur différence et leur opposition, mais ap­prendre à en faire un bon usage. En faisant cesser des animosités et des rancœurs, en s'interpellant et en débattant amicalement, catholiques et protes­tants se rendent mutuellement service. Ils ne doivent pas viser une uniformi­sation, mais entretenir un dialogue critique*.

3. Les relations interconfessionnelles

1. Au seizième siècle, malgré les guerres de religion, ont lieu de nom­breuses tentatives de conciliation ou de réconciliation entre partisans et ad­versaires de la Réforme. On peut mentionner, entre autres, la diète d'Aug­sbourg en 1530 et le colloque de Poissy en 1561. Au dix-sep­tième siècle, en dépit d'oppositions et de contro­verses très vives, des conversations et des cor­respondances s'enga­gent entre des catholiques (comme Bossuet), et des protes­tants (ainsi Leibniz ou le pasteur Ferry de Metz). Quelques-uns, qu'on appelle les "accommodeurs de religion", cher­chent la voie d'une réunification. La Révocation de l'édit de Nantes, qui, en 1685, interdit le protestan­tisme en France et s'accompagne d'une répression féroce, arrête ces discussions. Dans toute l'Europe, les protestants ont perdu confiance dans les catholiques et ne veulent plus discuter avec eux. Les rela­tions interconfessionnelles ne re­prennent vraiment qu'au vingtième siècle. Les mettent en route, dès avant la seconde guerre mondiale, quelques hommes isolés, que l'on considère comme des précur­seurs (le plus connu est l'abbé Couturier). Ils ne savent pas très bien où ils aboutiront, ni comment s'y prendre, mais résolument ils travail­lent à un rapprochement. Ils organisent des rencontres discrètes, presque clandestines, souvent considérées avec beaucoup de mé­fiance par les autorités des deux bords. Les contacts entre catholiques et protes­tants se font, alors, dans de tout petits groupes qui n'ont pas beau­coup de poids ecclésiastique et que la masse des fidèles ignore. Leur travail été cependant fécond; il a permis à des hommes de parler en­semble, d'apprendre à se connaître et à se respecter mutuellement.

2. Les choses vont s'accélérer et changer avec le second Concile du Vatican qui ouvre des portes nouvelles. Ce concile a un double effet.

- D'un côté, il modifie le jugement très sévère que les protestants por­taient sur l'Église catholique. Elle leur paraissait figée, rigide, en­fermée dans ses structures comme dans une cage ou une prison. On trouve ce jugement dans un livre intitulé Les religions d'autorité et la religion de l'Esprit, publié en 1903 par le  théologien protestant français le plus en vue à l'époque, A. Sabatier. Après le premier concile de Vatican et sa définition de l'infaillibilité pontificale, Sabatier estime impossible qu'une évolution se produise; tout est, selon lui, verrouillé. Or, voici que de manière inattendue, le catholi­cisme se met à bouger et à se réformer, ce qui pour les protestants constitue une signe d'authenticité (une Église authentique est une Église qui sait se réformer). Ils en viennent à se demander si, avec des siècles de retard, Rome n'entend pas, enfin, le message de Luther.

- De l'autre côté, le Concile rappelle aux catho­liques l'existence et l'inté­rêt d'un christianisme non romain. À une attitude d'ignorance, de rejet et de mépris, succède une volonté de dialogue et de ren­contre. Des liens et des ami­tiés se nouent, des collaborations dans plusieurs domaines s'esquissent.

Dans les années qui suivent le Concile, on multiplie des gestes spectacu­laires sym­boliques : des conférences publiques avec prêtres et pasteurs, qui, dans les années 60, réunissent des foules; des of­fices dits "œcuméniques", chacun invitant l'autre à prêcher dans son église; des déclarations communes des autorités ecclésiastiques; les visites spectacu­laires de Paul VI au siège du Conseil Œcuménique des Églises à Genève et de Jean-Paul II à l'église luthé­rienne de Rome, etc.

Il s'agit de gestes "symboliques-spectaculaires", en ce sens qu'ils ne ré­solvent aucun  problème. Ils visent à frapper les esprits et à établir un nou­veau climat. Ce résultat a été largement atteint. Les relations entre ca­tholiques et protestants deviennent confiantes et amicales. Elle témoi­gnent d'un respect mutuel beaucoup plus grand que naguère. Toutefois, cette pédagogie ou cette stratégie des gestes spectaculaires s'épuise à la fin des années 70. A la longue, elle devient lassante, décevante, et entretient des illusions. Elle pousse à culti­ver le "sensationnel" plutôt que de travailler en profondeur. Elle comporte un aspect négatif pour le protestantisme. En affi­chant ses bonnes relations avec le catholicisme, il perd les contacts et les sym­pathies qu'il avait dans les mi­lieux laïcs, tout spécialement parmi des intellectuels libres-penseurs ou "libres croyants", comme on disait au début du vingtième siècle.

3. Au début des années 80, on constate un raidissement et un durcisse­ment dans les relations interconfessionnelles. Le catholi­cisme maintient, par­fois renforce des pratiques et des doctrines traditionnelles qu'un peu naïve­ment les protestants espéraient voir tomber en désuétude assez rapi­dement. De leur côté, les protestants prennent une conscience vive de leur identité reli­gieuse et l'affir­ment à nouveau avec vigueur. De plus, les com­missions ecclé­sias­tiques et théologiques ouvrent des dossiers épineux, celui du sacre­ment ou du ministère par exemple, qui font apparaître des désac­cords profonds (en particulier, mais pas seulement sur l'accession des femmes à tous les minis­tères). Des irritations se produisent au­tour de l'hospitalité eucharistique. Alors que les protestants ouvrent leur table de communion aux catholiques, les épis­copats français, suisses, allemands posent des conditions quasi impossibles pour ac­cueillir des protestants à l'eucharistie; les protestants s'en indignent. De leur côté, les catholiques s'irritent de l'insistance protestante sur ce point, dans laquelle ils voient un manque de tact et de compré­hension. À tout ceci, s'ajoutent des attitudes différentes dans le do­maine de l'éthique biomédicale.

Il n'y a pas lieu de déplorer cette évolution, même si elle a des aspects regrettables, ni d'y voir une régres­sion. Les relations entre catholiques et protestants entrent dans une étape nouvelle, moins romantique et plus lucide.  Au lieu de contourner les pro­blèmes, on les examine, on les approfondit. Il faut le faire si on veut avan­cer. La seconde étape était dominée par un œcu­ménisme de type homo­phile. On se voulait semblable à l'autre, identique à lui pour pouvoir s'aimer et s'unir. Dans cette perspective, on voulait écarter les cri­tiques réciproques et cacher les désaccords. Parler de ce qui divise passait pour de la mauvaise volonté et on y voyait un désir d'entre­tenir des querelles inutiles. La troi­sième étape marque le passage de l'homophilie à l'hétérophi­lie, qui accepte la diversité, essaie de la prendre en compte, et non de l'annu­ler. On entre­prend alors un véri­table dialogue entre gens que leurs désac­cords n'empê­chent pas de s'estimer. Il ne s'agit pas d'annuler la différence, mais de s'en servir pour réfléchir sur soi et sur autrui et d'apprendre à en faire  un usage positif.

Quand on insiste sur la différence d'attitudes envers le sacré entre ca­tholicisme et le protestantisme, la tension entre les deux pôles opposés appa­raît indispen­sable pour la vie de la foi. Il ne faut pas y voir un mal; si cette opposition disparaissait, ce serait une catastrophe. On tomberait soit dans l'idolâtrie soit dans une reli­giosité vide. "Nous considérons, écrit C. Wagner, la diversité non comme un mal nécessaire et inévitable, à supporter en pa­tience, mais comme un grand bien. Nous sommes persuadés que les di­verses catégories d'esprit, et leurs tendances sont indispensables pour la recherche de la vérité et l'équilibre moral et religieux de l'humanité"*. Il faut situer dans cette perspective le débat entre les diverses Églises chrétiennes, ainsi que l’objectif du dialogue in­terconfessionnel, appelé couramment mais à tort “œcuménique” ("œcuménique" signifie au sens propre qui concerne toute la terre habitée, l’ensemble de l’humanité. Désigner par ce mot les relations entre Églises chrétiennes revient donc à en faire un usage impropre et exa­géré). Pas plus que la division, l'unité institutionnelle et doc­trinale ne constitue un bien en soi. Il s'agit de mettre en tension dynamique la ten­dance sacramentelle et sacerdotale d’une part, l’atti­tude prophétique et ico­noclaste d’autre part, ce que des insti­tutions ecclésiastiques différentes fa­vorisent probablement mieux qu'une institution ecclésiastique unique. La rupture du seizième siècle vient, en par­tie, de ce qu’on a eu le sentiment que dans l'Église de l'époque le pôle protesta­taire se trouvait étouffé et éli­miné, de sorte qu’il ne pouvait plus trouver sa juste place. De l'autre côté, si la sépara­tion devient telle qu'il n'y a plus relation ni dia­logue, la critique et la cor­rection de l'un par l'autre s'évanouissent. Catholiques et protestants ont dé­couvert ces dernières années combien ils avaient à gagner à se rencontrer et à discuter. Leur fi­délité à l'évangile se renforce, l'authenticité de leur chris­tianisme s'approfondit, leurs convictions se rectifient par de constantes confrontations.  Le Conseil Œcuménique des Églises, lieu où les Églises dialo­guent sans que disparaissent leurs diffé­rences, apparaît ici comme une solu­tion intéressante.

André Gounelle

Notes :

* Texte dans E. Léonard, Histoire générale du protestantisme, P.U.F., 1961, t.1, p. 112.

* Voir R. Zuber, "Défense et illustration de l'individualisme protestant”, Revue d'histoire et de philosophie religieuses, 1966/3 et A. Gounelle, "L'individualisme protestant", Le Cep, novembre 1994.

* H. Bost, "Protestantisme, une naissance sans faire part", Études théologiques et religieuses, 1992/3, p. 362-363.

* J. Courvoisier, De la Réforme au protestantisme, Beauchesne, 1977. B. Cottret, 1598. L'Édit de Nantes, Perrin, 1997, p.41.

* Protestantisme et modernité, Gallimard, 1991 (or. 1909-1913); cf. The Christian Faith, Fortress Press, 1991 (or.1925), p. 19. H. Bost (art.cit., p. 368) soutient une thèse voisine.

* B. Cottret suggère de distinguer la Réforme, le protestantisme d'Ancien Régime (dix-septième siècle), et le protestantisme moderne, 1598. L'Édit de Nantes, p. 198.

* W. Monod, Du Protestantisme, Felix Alcan 1928; P.Tillich, Substance catholique et principe protestant, Cerf, Labor & Fides, P.U.L., 1996.

*  Ainsi dans un ouvrage publié en 1606, E. Sandys souligne la diversité et les divisions des catholiques, aussi importantes que celles des protestants. Voir B. Cottret, 1598. L'Édit de Nantes, p. 259, 260.

* Dictionnaire de Théologie fondamentale, Bellarmin et Cerf, 1992, p.291, qui se réfère à la constitution Pastor Aeternus  du premier concile de Vatican.

* Quand ils parlent de "dogme", les protestants comprennent ce mot au sens "d'une confession qui répondrait à la parole de la révélation divine sans toutefois participer à l'autorité de la révélation elle-même" (Dictionnaire de Théologie fondamentale, p.299).

* Voir Jean Calvin, Défense de Guillaume Farel et de ses collègues contre les calomnies de Pierre Caroli par Nicolas Des Gallars, traduction, présentation et notes de Jean-François Gounelle, P.U.F., 1994, p. 63.

* Revue réformée, n°23, 1955/3, p.13.

* Cf. E.A. Dowey, "Confessional Documents as Reformed Hermeneutic" in D. McKim (ed.), Major Themes in the Reformed Tradition, Erdmanns, 1992, p. 28-29. Le chapitre 3 de ce cours (seconde partie) "La Réforme et la Bible" reviendra plus en détail sur ce point.

* F. Buisson et C. Wagner, Libre pensée et protestantisme libéral, Fichbacher, 1903, p. 93-94. Réédition en 1992 par l'Eglise Réformée de la Bastille (Foyer de l'Ame) sous le titre Sommes nous tous des libres croyants?, p. 24.

* Cette formule date du dix-septième siècle. On l'attribue au piétiste hollandais Jodocus von Lodenstein qui l'aurait employé dans un livre publié en 1675. Peut-être Voetius l'a-t-il employé quelques années plus tôt.

* Les fondamentalistes qui tendent à diviniser la Bible m'apparaissent comme des "catholiques" non romains (plutôt que comme des protestants) et je qualifierai volontiers certains progressistes catholiques des "protestants romains".

* Cf. O. Fatio, "Quelle réformation ?", Revue de Théologie et de Philosophie, 1986/2, p.127.

* Substance catholique et principe protestant, p. 287.

* "Qu'est-ce que le protestantisme?" dans L. Gagnebin et A. Gounelle, Le protestantisme, ce qu'il est ce qu'il n'est pas., La Cause, 1985.

* Cf. La foi chrétienne, § 24.

* Cf. dans la quatrième partie, le chapitre sur l'Eglise qui développe cette distinction.

* Voir sur ce paragraphe, A. Gounelle, "Catholiques et protestants : du bon usage de la différence" in Le protes­tantisme et son avenir, Labor et fides, 1998.

* F. Buisson et C. Wagner, Libre pensée et protestantisme libéral, Fichbacher, 1903, p. 114. Réédition en 1992 par l'Eglise Réformée de la Bastille (Foyer de l'Ame) sous le titre Sommes-nous tous des libres croyants?, p. 49.

 

Cours donné par André Gounelle
sur le protestantisme

Appendice

Liste des écrits "officiels" qui exposent les positions théolo­giques des diverses Réformes et des diverses familles confessionnelles.

Dans cette liste, il s'agit d'écrits de référence adoptés par les "autorités ecclésiastiques" de chaque courant ou Église et faisant autorité. Toutefois, cette autorité varie selon les confessions : très grande dans le cas du catholi­cisme, elle est moindre pour les luthériens et les réformés, et très relative dans le cas de la Réforme radicale, où l'on devrait parler d'écrits "représen­tatifs" ou "significatifs" plutôt que "officiels".

Écrits symboliques luthériens :

LUTHER Martin, Petit catéchisme (1529), Grand Catéchisme (1529), Articles de Smalkalde (1537).

MELANCHTHON Philippe, Confession d'Augsbourg (1530), Apologie de la Confession d'Augsbourg (1530), Le pouvoir et la primauté du pape (1537).

(Ces écrits se trouvent en traduction française dans La foi des Églises lu­thériennes, textes édités par A.Birmelé et M.Lienhard, Cerf, 1991).

Écrits symboliques réformés :

Catéchisme de Genève (1545), Confession de La Rochelle (1559-1571), Catéchisme d’Heidelberg (1563), Confession helvétique postérieure (1566).

(édités par O.Fatio en traduction française dans Confessions et catéchismes de la Foi Réformée , Labor et fides, 1986).

Il faut ajouter à ces écrits le Consensus Tigurinus (1549), publié en traduc­tion fran­çaise dans Calvin, homme d'Église, Labor, 1936.

Écrits représentatifs des radicaux :

Confession de Schleitheim (1527), Confession et Pacification de Dordrecht (1632), textes en traduction française dans P. Widmer et J.H. Joder, Principes et doctrines des Mennonites, Publications mennonites, 1955.

Les vingt-neufs articles résumant la Confession de foi de Marpeck (1532), texte dans N. Blough, Christologie anabaptiste; Labor et Fides, 1984.

Catéchisme de Rakow (1603) The American Theological Association, 1962 (texte en anglais).

Écrits symboliques de l'Anglicanisme :

Les Trente-neuf articles (1562), et Prayer Book (1559), nombreuses éditions.

Textes du magistère de l'Église Catholique :

Les Conciles Œcuméniques. 2 : Les décrets (2 vol.) sous la direction de G. Alberigo, Cerf, 1994 (textes latin et français). Les textes du Concile de Trente se trouvent dans le vol. 2.

DENZINGER Heinrich, Symboles et définitions de la foi catholique. Cerf, 1994.

Notes :

* Sur ce vocabulaire, voir M. Vénard, "Réforme, Réformation, Préréforme, Contre-Réforme. Étude de vocabulaire chez les historiens récents de langue française" in P. Joutard (éd.), Historiographie de la Réforme, Delachaux et Niestlé, 1977.

* Cf. T. Wanegffelen, "Réforme, réformations, protestantisme" in J. Miller (éd.) L'Europe protestante aux XVI° et XVII° siècles, Belin - De Boeck, 1997, p. 32-38.

* Il semble que le pluriel "les Réformes" ait été introduit dans l'historiographie par Lucien Febvre, dans un article publié par la Revue de Métaphysique et de Morale en 1936.

* Cf. B. Moeller, "Les villes, les livres et la Réforme en Allemagne", Bulletin de la Sociét de l'histoire du protestantisme français, 1993/1, p. 22-23.

* F.Higman, La diffusion de la Réforme en France, Labor et Fides, 1992, p.16.

* Longtemps, on a pensé que Luther avait affiché ses thèses sur la porte de la Chapelle du château de Wittenberg. Il s'agit peut-être d'une légende, et il paraît possible qu'il les ait seulement publiées (voir R. Stauffer, Interprètes de la Bible, Beauchesne, 1980, p. 44-57, et M. Lienhard, Martin Luther, un temps, une vie, un message, Le Centurion, Labor et Fides, 1983, p. 395 à 402).

* Cf. B. Moeller, "Les villes, les livres et la Réforme en Allemagne", Bulletin de la Société de l'histoire du protestantisme français, 1993/1, p. 27.

* Du coup, Zwingli tient sa légitimité pastorale non pas de l'agrément de l'évêque mais du mandat du Conseil de la ville. C'est une révolution du statut ecclésiastique.

* L'afflux des réfugiés français, dont beaucoup acquièrent la citoyenneté genevoise, donne la majorité à Calvin.

* On trouve ces textes, et d'autres dans O. Fatio (ed.), Confessions et catéchismes de la foi réformée, Labor et Fides, 1986.

* Cf. G. Williams, The Radical Reformation, Westinster Press, 1962, p. XXIV et J.H. Yoder (qui préfère l'appellation "officielle") dans M. Lienhard (éd.), Les débuts et les caractéristiques de l'anabaptisme, Martinus Nijhoff, 1977, p. 4, note 5.

* Une partie du débat a été traduite en français dans l'article de G. Hammann, "Clarté et autorité de l'Écriture. Luther en débat avec Zwingli et Erasme", Études theologiques et religieuses, 1996/2, p. 177-182.

* Cf. P. Maury, "L'unité de l'Église au seizième siècle et aujourd'hui", Foi et vie, 1959/2, p. 72.

* Cf. M. Lienhard, "Étude critique", Revue d'histoire et de philosophie religieuses, 1994/3, p. 267, et G. Hamman "Martin Bucer" dans J. Miller (ed), L'Europe protestante au XVI° et XVII° siècles, p. 82-84.

* R. Stauffer estime ce concept très contestable (Interprètes de la Bible, p. 31-41); l'expression prête, en effet, à critique; elle est néanmoins commode pour désigner une mosaïque de groupes qui ont des traits communs. cf. J. van den Berg, "Radicaux, millénaristes et spiritualistes" dans J. Miller (ed), L'Europe protestante au XVI° et XVII° siècles, p. 271.

* P. Janton, Voies et visages de la Réforme au XVI° siècle, Desclée, 1986, p. 142.

* P. Janton, Voies et visages de la Réforme au XVI° siècle, p. 145.

* Cf. N. S. Davidson, La Contre-Réforme, Cerf, 1989, p. 7-8; M. Vénard, "Réforme, Réformation, Préréforme, Contre-Réforme. Étude de vocabulaire chez les historiens récents de langue française" in P. Joutard (éd.), Historiographie de la Réforme, p. 355.

* R. Stauffer, La Réforme, Que sais-je? 1974 p. 5-8; T. Wanegffelen, "Réforme, réformations, protestantisme" in J. Miller (ed.) L'Europe protestante aux XVI° et XVII° siècles, p. 32-38; M. Lienhard, "Luther avait-il conscience de réformer l'Église?", Revue de Théologie et de Philosophie, 1986/2, p. 146.

* F.Higman, La diffusion de la Réforme en France, p. 14; M. Lienhard, Martin Luther, un temps, une vie, un message, p. 19; N. S. Davidson, La Contre-Réforme, p. 13-14.

* D. Erasme, Les Préfaces au Novum Testamentum, Labor et Fides, 1990, p. 75 (texte écrit en 1516).

* R. Stauffer, Interprètes de la Bible, p. 11-29; F.Higman, La diffusion de la Réforme en France, p. 19-24.

* Y. Congar, Vraie et fausse réforme de l'Église, Cerf, 1950, p. 356-367.

* Cf. R. Stauffer, La Réforme , p. 6.

* Cf. E.W. Kohls, "Erasme et la Réforme", Revue d'histoire et de philosophie religieuses, 1970/3.

* Cf. R. Walter, "Beatus Rhenanus (1485-1547) entre l'Église traditionnelle et la réformation" dans M. Lienhard (éd.), Les dissidents du XVI° siècle entre l'Humanisme et le Catholicisme. Éditions Valentin Koerner, 1973.

* Cf. T. Wanegffelen, Ni Rome ni Genève. Des fidèles entre deux chaires en France au XVI° siècle, Honoré Champion, 1997, p. 38-47.

* Ni Rome ni Genève. Des fidèles entre deux chaires en France au XVI° siècle, p. XV-XVI.

* T. Wanegffelen, Ni Rome ni Genève, p. 203.

* Les papes des années 1517-1580 sont : Léon X (1513-1521), Adrien VI (1522-1523), Clément VII (1523-1534), Paul III (1534-1549), Jules III (1550-1555), Marcel II (1555), Paul IV (1555-1559), Pie IV (1559-1565), Pie V (1566-1572), Grégoire XIII (1572-1585).

* mot prêté au pape Léon X.

* On le constate très fortement en Allemagne; voir B. Moeller, "Les villes, les livres et la Réforme en Allemagne", Bulletin de la Société de l'histoire du protestantisme français, 1993/1, p. 7-8.

* Selon H. Hauser, La naissance du protestantisme, P.U.F., p.9, le concordat de 1516 explique que le roi de France n'ait pas opté pour la Réforme.

* Cf. H. Hauser, La naissance du protestantisme, p.9 : "il ne serait pas moins faux d'oublier que la Réforme fut en son principe et en son fond une révolution religieuse".

 

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André Gounelle

Professeur émérite de la faculté de théologie protestante de Montpellier

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