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Religions et confessions
On dit parfois que catholiques, protestants et orthodoxes ont la même religion mais se distinguent par la confession à laquelle ils
se rattachent. Par contre, ajoute-t-on, chrétiens, juifs, musulmans et
bouddhistes ont des religions différentes. De tels propos me
semblent utiliser de travers les termes « religion » et « confession ». Je
sais bien que toute définition comporte une part d’arbitraire et qu’une
terminologie exacte ne résout pas les problèmes. Elle aide cependant à les
clarifier ; essayer de déterminer le sens des mots n’est donc pas inutile.
On fait souvent dériver « religion » du verbe latin religare, qui
veut dire relier, établir des relations. Même si cette étymologie est
discutable, le mot « religion » s’applique normalement à la manière dont
nous organisons et comprenons nos relations avec Dieu, avec nos semblables,
avec nous même et avec le monde. La confession se rapporte à la foi ; elle
dit à qui ou à quoi nous faisons confiance pour notre vie ; elle indique
celui ou ce qui oriente et dirige notre existence. Ces définitions rendent
difficile de considérer les églises chrétiennes comme des confessions
différentes et de voir dans l’Islam, le judaïsme et le christianisme des
religions différentes.
Je viens de lire un livre d’un philosophe marocain qui présente une
interprétation « personnaliste » de l’Islam (tous les musulmans ne la
partagent malheureusement pas). Selon le Coran et la sunna,
explique-t-il citations à l’appui, tous les êtres humains (y compris les
mécréants) ont droit, en tant que créatures de Dieu, à un total respect ;
ils ont avec Dieu une relation directe et individuelle, sans la médiation
obligatoire d’un clergé ou d’un rite ; chacun doit suivre son propre chemin
et non pas imiter ou reproduire un modèle ; nous devons nous entraider et
nous engager pour améliorer le monde. En parcourant ces pages, à maintes
reprises, j’ai eu le sentiment que sa religion est très proche de la
mienne, en ce sens que nos compréhensions des rapports avec Dieu et entre
les hommes se ressemblent. Par contre, nous n’avons pas du tout la même
confession de foi. Il croit que Mohammed est le messager et le Coran le
message de Dieu, alors que pour moi c’est Jésus et l’évangile (l’un et
l’autre, nous admettons que Dieu se manifeste aussi ailleurs).
À l’inverse, des catholiques (pas tous) organisent leur spiritualité autour
de l’eucharistie, de la communion avec leur évêque et avec le pape, de la
vénération de Marie et des saints. Des evangelicals (pas tous) sont
convaincus que la Bible est dictée par Dieu (pour moi elle est témoignage
humain rendu à Dieu). Ils croient quantité de choses qui me paraissent
fausses. Ils ont une religion, une manière de comprendre et de vivre leur
relation avec Dieu, différente de la mienne. Par contre, nous avons la même
confession à savoir que Dieu se révèle et agit en ce Jésus dont parlent les
évangiles. De son côté, mon marocain partage la même confession de foi
(celle que Mohammed est le prophète d’Allah) que tous les musulmans, mais
il comprend et vit l’islam autrement que beaucoup d’entre eux, en
particulier que les islamistes. J’ai choisi l’exemple d’un musulman, mais
on fait des constats analogues avec des juifs ou des bouddhistes.
On peut être très proche par la religion et pas du tout par la confession
de foi. On peut avoir la même confession de foi et des religions qui
s’opposent. Il me semble qu’on éviterait bien des malentendus si on en
avait clairement conscience.
André Gounelle
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